• Cultures de peaux, muqueuses reconstruites… Des méthodes alternatives high tech
  • L’Homme sur une puce pour les grands groupes
  • Aux États-Unis, un gigantesque travail sur l’exploitation des données
  • En Asie, le début d’une ouverture pour éviter les tests sur les animaux
  • Le label cruelty free, graal pour les marques

L’Union Européenne a interdit depuis mars 2013 la commercialisation et l’importation dans ses états membres de tout cosmétique ayant été testé sur l’animal, qu’il s’agisse du produit fini ou de ses différents ingrédients. Cependant, l’exportation d’un produit, vers les pays d’Asie notamment, ne garantit pas qu’il ne sera pas testé sur des animaux là-bas. 

La solution : pousser au développement de méthodes alternatives.

Méthodes depuis bien longtemps utilisées déjà dans les grands groupes cosmétiques. Ainsi, tous consultent leur banque de données pour vérifier l’innocuité d’un principe actif ou ont recours aux méthodes alternatives validées par l’OCDE (Organisation pour la coopération et le Développement Economique). Il en existe à l’heure actuelle plus de 200, parfaitement fiables. Certains testent in vitro sur culture de peau (L’Oréal).

Pour démontrer l’efficacité des produits chez Pierre Fabre Dermo Cosmétique, une équipe d’experts est même dédiée au développement de modèles de peaux reconstituées les plus proches de la physiologie cutanée, grâce à des cultures cellulaires en trois dimensions. D’autres maisons enfin font appel à des fournisseurs qui garantissent dans un cahier des charges le « No Animal Testing » (LVMH, Estée Lauder).

Cultures de peaux, muqueuses reconstruites… Des méthodes alternatives high tech 

L’Oréal, mastodonte du secteur qui possède des ingrédients captifs -c’est à dire développés par sa propre Recherche- s’est attaché dès 1989 à mettre au point des tests alternatifs et prédictifs extrêmement pointus et sophistiqués et, depuis mars 2013, le groupe n’effectue plus aucun test sur l’animal où que ce soit dans le monde.

Il dispose en outre, depuis des années, de cultures de peaux et autres muqueuses reconstruites. Elles sont non seulement disponibles pour tester la tolérance des produits et la toxicité de nouvelles molécules, mais servent également pour les greffes des grands brulés à Lyon et à Percy. D’autre part, le groupe a accumulé depuis des années une banque de données riche de plus de 50 000 ingrédients. Autant de principes actifs qui peuvent être utilisés sans avoir recours à de nouveaux tests.

Et si une nouvelle molécule doit être utilisée dans certaines formulations et n’existe pas dans cette banque de données, on fait alors appel à plusieurs outils : le raisonnement par analogie ou la toxicologie computationnelle.

Le principe consiste à voir si la nouvelle molécule n’a pas des analogies de structure avec des molécules connues, et si les données de toxicité peuvent être extrapolées de façon fiable ; ou si en entrant la structure moléculaire le programme informatique peut indiquer des alertes de toxicité. En ce cas il faut aller plus loin encore et avoir recours aux cultures de cellules, aux tissus biologiques reconstruits, à des organismes simples comme des œufs de poissons. Tous ces outils prédictifs guident vers la molécule susceptible de ne pas générer d’effets toxiques.

Lush, marque engagée dans de nombreuses causes dont la protection animale, travaille pour sa part depuis 2013 avec XCellR8, une entreprise dédiée au développement de tests in-vitro innovants pour déterminer la sûreté et l’efficacité des produits cosmétiques. 

Autre géant de la cosmétique à plébisciter les méthodes alternatives : The Body Shop, qui lutte depuis 1989 pour les droits des animaux. « Les analyses in silico (effectuées sur ordinateur) utilisent des données existantes disponibles immédiatement pour nous aider à évaluer par extrapolation si des matériaux similaires sont adaptés, détaille-t-elle sur son site. La peau produite en laboratoire est générée à partir de cellules cutanées humaines. Cela nous permet de procéder à des vérifications de sécurité sur des cellules réagissant virtuellement de la même façon que la peau humaine, sans nuire à des êtres humains ou à des animaux. Pour finir, nous testons souvent nos produits à l’aide de tests épicutanés permettant de garantir leur tolérance sur la peau. Pour ce faire, nous plaçons une petite quantité de produit sur la peau d’un individu afin de vérifier son efficacité et son innocuité, en général au moment de l’étape finale du test d’une nouvelle formule. Nous effectuons également des essais contrôlés sur des utilisateurs, durant lesquels des personnes testent nos produits afin de vérifier la compatibilité avec la peau et l’efficacité cosmétique de ces derniers, sous la supervision d’experts médicaux le cas échéant.

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L’Homme sur une puce pour les grands groupes

Dans tous les cas, il faut se rapprocher le plus possible de l’Homme. Car le but est bel et bien de prédire l’innocuité chez celui-ci. Plusieurs grands programmes de Recherches mondiaux aux noms évocateurs (Toxcast, Tox 2, Human on a chip) y travaillent et regroupent des centres de recherches publics et privés, des universités, des industries…

Dans cette logique, L’Oréal en collaboration avec l’University of Central Florida, a conçu un système prédictif révolutionnaire : 4 Organs on Chips.

Il s’agit d’une puce microfluidique qui comporte quatre réservoirs de cellules humaines de foie, de rein, de cerveau, de muscle nourries par un liquide nutritif qui circule dans de petits canaux simulant la circulation sanguine. Les cellules ont une durée de vie de 12 jours et se comportent comme les organes lorsqu’elles sont exposées à une substance toxique de référence.

Une prouesse technologique.

Aux États-Unis, un gigantesque travail sur l’exploitation des données

Aux États-Unis, où aucune réglementation n’interdit les tests sur animaux, l’Agence de Protection de l’Environnement a investi dans la valorisation de toutes les données de toxicité existant sur des molécules utilisées dans tous les secteurs, chimiques, pharmaceutiques ,cosmétiques etc.

Cette approche est basée sur le credo que c’est le nombre des données et non la qualité qui rend la prédiction robuste et fiable.

Ce sont d’exceptionnels outils de modélisation auquel L’Oréal a accès à travers une collaboration. Le Groupe n’est d’ailleurs pas le seul puisque Procter and Gamble, ou Unilever y ont aussi accès, tout comme des industries de l’agro-alimentaire et d’importants Laboratoires Pharmaceutiques.

On est loin du modèle animal, et les résultats sont autrement plus fiables puisque la peau d’un rongeur est loin de toujours réagir comme la peau d’un humain.

En Asie, le début d’une ouverture pour éviter les tests sur les animaux

Reste la Chine, qui exige que tous les produits fabriqués hors de son territoire et commercialisés sur son sol aient fait l’objet de tests sur animaux, malgré des dossiers de sécurité européens complets. Mais cela devrait bientôt changer. 

À partir de mai 2021, la Chine s’est engagée à ne plus faire aucun test sur les animaux pour les produits cosmétiques « ordinaires » importés (sérums, gommages…). Les fabricants devront posséder un certificat de conformité aux Bonnes Pratiques de Fabrication (BFF) afin de prouver l’innocuité des produits exportés. La France est l’un des premiers pays à pouvoir le délivrer via l’Agence des Produits de Santé et du Médicament (ANSM), a annoncé la FEBEA dans un communiqué. Depuis le 12 janvier 2021, l’ANSM a mis en ligne une plateforme dédiée permettant de télécharger les documents nécessaires pour l’obtention de ce certificat.

Une décision qui marque seulement le début d’un assouplissement. En effet, les colorations capillaires, déodorants, crèmes solaires ou anti-taches qui sont des produits dits « fonctionnels », c’est-à-dire ayant une activité biologique, seront quant à eux toujours testés sur les animaux. De même, les produits destinés aux enfants ; les produits utilisant des ingrédients nouveaux (au sens de la réglementation chinoise) pendant la durée de surveillance de trois ans à laquelle ils sont soumis ; les produits notifiés, importés ou fabriqués par une personne faisant l’objet d’une procédure de surveillance renforcée de la part de la NMPA, continueront d’être testés sur les animaux précise le site Premium Beauty News.

Dès 2013, L’Oréal a pourtant contribué dans le pays à la première phase de validation d’une méthode alternative portant sur l’irritation de la peau, sur des modèles de peaux chinoises, fabriquées et commercialisées en Chine par Episkin Shanghai Biotechnology.

Au Japon il en va autrement : aucune loi n’interdit ou n’exige des tests sur l’animal. Les grandes entreprises nippones qui exportent en Europe sont depuis longtemps aux normes de la CEE et il y a fort à parier que la plupart des marques nationales vont suivre le mouvement.

De quoi, espérons-le, arriver bientôt à ce que souhaitent tous les chercheurs et pas seulement les cosmétologues mais aussi les pharmaciens, biologistes… et amis des animaux : le dernier R de la règle des trois R : « Raffiner » (pas de souffrance), « Réduire » (en faire le moins possible), »Remplacer », l’idéal.

Le label cruelty free, graal pour les marques

Plusieurs labels garantissent aux consommateurs que les marques qu’ils achètent ne testent pas sur les animaux ET ne sont pas commercialisées en Chine. Parmi eux, le Leaping Bunny de Cruelty Free International, une organisation dont la mission est de mettre un terme à l’expérimentation animale dans le monde entier.

Dernière marque à s’être vue remettre ce graal en mars 2021 : Garnier (Groupe L’Oréal), dont tous les produits sont officiellement approuvés par Cruelty Free International, au niveau mondial.

« Garnier s’engage contre les tests sur les animaux depuis 1989. Elle ne teste aucun de ses produits ni aucun de ses ingrédients sur les animaux et participe à l’avant-garde des méthodes d’évaluation alternatives, explique à Marie Claire, Elodie Bernardi, Directrice générale de Garnier. Ce label est la preuve de la volonté de la marque de faire tout son possible pour surveiller attentivement son réseau de fournisseurs en continu et de son engagement à éliminer toute expérimentation animale dans sa chaîne d’approvisionnement. »

https://www.instagram.com/p/CMMOH6koPdS/

Les produits Garnier n’étant pas vendus en Chine, ils ont pu obtenir cette certification. « C’est le seul label international qui exige que chaque entreprise mette en œuvre un système de surveillance de ses fournisseurs, contrôle sa chaîne d’approvisionnement jusqu’au niveau du fabricant de chaque ingrédient, et fait en sorte que des audits indépendants puissent être menés à tout moment pour garantir sa conformité avec tous ces aspects », précise Elodie Bernardi.

Garnier nous explique avoir dû fournir à Cruelty Free International de nombreuses preuves de chacun de ses fournisseurs, qui seront ensuite contrôlées régulièrement. « Il s’agissait d’auditer plus de 500 fournisseurs qui fournissent plus de 3 000 ingrédients différents à travers le monde. Ce fut un travail de presque 3 ans de collaboration pour réunir ces preuves et s’assurer que tous les produits Garnier du monde entier peuvent officiellement porter le célèbre logo Leaping Bunny. »

Comme le rappelle l’association de défense des animaux PETA, qui elle aussi délivre des labels, « certaines marques vendent des produits non testés sur les animaux, mais appartiennent à des sociétés qui testent ». Elle ajoute que « les tests sur les animaux sont interdits pour les cosmétiques commercialisés dans l’Union européenne, excepté si les ingrédients sont soumis à la loi REACH et entrent donc dans le développement d’autres types de produits. Dans ce cas le test est obligatoire. Certains produits finis sont ‘cruelty free’ mais les ingrédients qui le composent sont donc testés. »

Liste des labels qui garantissent l’absence de tests sur les animaux sur les produits finis, les ingrédients et les marchés étrangers : Animal test-free and vegan de PETA ; Animal test-free de PETA ; One Voice ; Leaping Bunny de la Coalition for Consumer Information on Cosmetics ; Choose cruelty-free.

Pour autant, certaines marques ne possèdent pas de labels et refusent d’exporter leurs produits en Chine. C’est le cas de KVD Vegan Beauty, REN, Urban Decay ou encore NYX. 

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