Sa biographie est impressionnante et, par bien des aspects, révolutionnaire.

Née en 1884, Alice Milliat se passionne rapidement pour le sport qu’elle découvre, à l’instar de son contemporain et fondateur des Jeux olympiques Pierre de Coubertin, en Angleterre. Elle pratique l’aviron à un haut niveau, mais aussi la natation et le hockey sur gazon. En 1915, à 31 ans, elle prend la présidence du club omnisports féminin Fémina Sport. Une étape qui l’amène ensuite à co-fonder la Fédération des sociétés féminines sportives de France en 1917, dont elle devient la présidente deux ans plus tard, et en 1921, à créer la Fédération sportive féminine internationale (FSFI).

Une décision forte, en réponse à l’immobilisme des institutions à inclure les femmes dans le monde du sport. Et dont elle ne compte pas se satisfaire. Un an après, elle lance la première édition des Jeux Mondiaux Féminins à Paris, en 1922. Et en 1928, elle réussit à faire avancer de manière significative son plus grand combat : celui de voir concourir des femmes à cinq épreuves d’athlétisme aux Jeux olympiques d’Amsterdam.

Pour l’athlète, le sport est davantage qu’un exercice. C’est une pratique qui doit permettre l’émancipation des femmes et devrait mener à l’égalité de genre dans la société. « Le sport féminin a sa place dans la vie sociale au même titre que le sport masculin », martèle Alice Milliat. « Il devrait même passer au premier plan des préoccupations du gouvernement : je n’exagère pas. » Pour communiquer son message essentiel, elle choisit la plume. Elle écrit dans nombreux journaux et revues, de tous bords, allant jusqu’à qualifier le sport d’acte patriotique : les femmes qui s’y adonnent feraient naître des enfants plus forts.

Un parcours militant pavé de luttes, d’indignation et de victoires auxquelles la France a souhaité faire honneur, ce lundi 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes.

« Le sport n’est pas masculin ou féminin, c’est du sport »

« Il n’est jamais trop tard pour réparer une injustice. Et honorer la mémoire, le parcours et le courage d’une véritable pionnière », a lancé la ministre de la Jeunesse et des Sports Roxana Maracineanu, dans le hall de la Maison du sport français, devant la statue tricolore haute de 2,85 m qui représente l’icône. Une oeuvre réalisée par deux étudiant·e·s de l’ENSAAMA, Eva Manna et Hector Vadancourt, et placée aux côtés de celle du baron de Coubertin. Sachant que le fondateur des Jeux estimait que le « rôle » des femmes « devrait être surtout, comme aux anciens tournois, de couronner les vainqueurs », l’ironie, quasi un siècle plus tard, est savoureuse.

« Alice Milliat est une héroïne », a poursuivi la ministre. « Je suis heureuse qu’elle trouve enfin sa place dans la maison du sport français et la mémoire collective. Son exemple est pour moi une grande inspiration à l’heure où nous voulons atteindre la parité dans les instances dirigeantes du mouvement sportif et renforcer la place des femmes dans le monde du sport ».

La parité, c’est justement ce qu’a promis le CIO pour les JO de Paris, d’ici 3 ans. « Paris 2024 entend perpétuer le combat engagé par Alice Milliat pour mettre en lumière les athlètes féminines, leur permettre de prendre toute la place qu’elles méritent, et donner envie à encore plus de femmes de faire du sport », a déclaré à son tour Tony Estanguet, président du Comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

« Homme ou femme, ce sont les mêmes gestes, les mêmes médailles, les mêmes émotions, la même rage de vaincre, la même fierté, le même pouvoir de nous inspirer et de nous rassembler. » Et le triple champion olympique de canoë de conclure : « Le sport n’est pas masculin ou féminin, c’est du sport. » Des mots qui, sans aucun doute, auraient ravi l’intéressée.

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