Le chef doublement étoilé Michel Portos co-organise un concours culinaire inter-prisons et s’est découvert une compassion insoupçonnée jusque-là. Le magazine Reportages découverte, présenté par Anne-Claire Coudray, l’a suivi. A découvrir dimanche 24 janvier à 13 h 40.
Télé Star : D’où vient l’idée de ce concours culinaire inter-prisons ?
Michel Portos : C’est une façon de concrétiser une formation de cuisine mise en place dans certaines maisons d’arrêt. Il permet d’aider les détenus mais aussi de mettre en avant les formateurs, qui font un job incroyable au quotidien. Et de prouver que l’administration pénitentiaire peut proposer des formations utiles. Certains détenus ont envie d’apprendre un métier et de trouver un travail à leur sortie de prison. Beaucoup de ceux qui ont participé au concours ont passé leur CAP cuisine.
Trouvent-ils vraiment du travail à leur libération ?
Ce n’est pas facile mais des chefs d’entreprise jouent le jeu. Je viens de vendre mes restaurants mais chaque année, j’embauchais un détenu qui restait jusqu’à douze mois chez moi. J’ai actuellement un projet sur Paris et je vais engager deux détenus à leur sortie.
Vous croyez donc à une seconde chance…
Sinon, je ne le ferais pas. Je crois aussi plus à la formation des détenus et aux gens qui veulent s’en sortir qu’à la plupart des élèves des écoles hôtelières. L’enjeu est plus important pour eux. Ils ne réussissent pas tous mais si nous pouvons en sauver un de la détention tous les ans, ce n’est pas mal.
Comment vous êtes-vous impliqué dans le milieu carcéral ?
En 2013, j’étais doublement étoilé et je venais de recevoir le titre de Cuisinier de l’année. J’ai été sollicité pour faire une intervention aux Baumettes, à Marseille, ma ville natale. J’ai fait un repas pour les 1 800 détenus. Les semaines suivantes, les libérés venaient me remercier au restaurant. Puis, un avocat fidèle de mon établissement m’a demandé de prendre son client à sa sortie. Il a été le premier détenu que j’ai embauché.
Cette implication a-t-elle renouvelé votre passion pour votre métier ?
Je n’ai jamais eu la passion de ce métier. Je l’ai fait par défaut. Je devais trouver un travail ou mon père me foutait dehors. J’ai commencé avec un CAP de cuisinier de collectivité. Quand je parle de cuisine, je ne parle pas de passion mais de travail car j’ai marné pour en arriver là. En revanche, j’ai la passion de la moto et de la plongée sous-marine. J’ai la passion de ce que je fais, comme cet engagement moral, social et solidaire envers le milieu carcéral.
Qu’avez-vous découvert sur vous depuis cet engagement ?
Que je n’étais pas aussi dur que je le pensais. Ces détenus me touchent profondément. Je précise que je ne côtoie pas de lourdes peines. Ils me racontent des parcours de vie incroyables. J’ai découvert une compassion que je n’avais pas détectée en moi.
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