La fin d’année 2020 est décidément riche en livres de qualité prenant pour sujet la musique. La bio sans filtre de Debbie « Blondie » Harry, le décorticage des chansons de Queen, la mémoire orale de Joy Division, les objets inspirants de Nick Cave, ou l’histoire du rock progressif en 150 groupes tiennent leurs promesses respectives.

J moins 2 avant de déballer les paquets sous le sapin. Si vos achats de Noël ne sont pas encore bouclés, voici une sélection de livres de qualité consacrés à la musique rock et ses musiciens

L’histoire orale de Joy Division par Jon Savage

Fameux journaliste de la presse musicale britannique, notamment auteur du remarquable England’s Dreaming (sur la Grande Bretagne au temps de l’émergence punk), Jon Savage avait déjà sorti un documentaire sur Joy Division en 2007, l’année de la sortie du biopic Control d’Anton Corbijn. L’influence majeure de ce groupe fauché par le suicide de son chanteur Ian Curtis, le 18 mai 1980, la veille de leur première tournée américaine, est unanimement reconnue. On a beaucoup écrit sur la personnalité de Curtis, les autres membres du groupe(devenu New Order) ont dit beaucoup dans leurs livres respectifs, d’autres docu ou docu-fiction ont éclairé ou obscurci le propos.

Il restait encore de la place pour un livre pertinent. Il donne la parole, sans commentaires, à une petite quarantaine de témoins et compagnons de la courte aventure, dont certains sont aujourd’hui décédés. Les connaisseurs en sortent un peu plus éclairés, tant sur la psychologie du groupe que sur la genèse de leur musique. La qualité de la construction et des points de vue fait qu’on cerne et dépasse le tragique pour embrasser une époque.

Le reste n’était qu’obscurité, Jon Savage, Allia, 368 p. 22 €.

Debbie Harry en direct

Certes, l’ouvrage a été rédigé par la renommée journaliste Sylvie Simmons à partir d’entretiens, mais on sent pleinement la personnalité de Debbie Harry dans cette « autobiographie ». La punk new-yorkaise qui s’assumait sex-symbol de Blondie. Sans être dupe, la petite fille adoptée cherchant son identité. La relation unique avec Chris Stein amant-ami-photographe-guitariste,. Le Manhattan excitant et dingue des années 1970. Le glamour et la dèche. Les aléas de sa carrière solo, Une carrière cinématographique intrigante, qui aurait pu être plus florissante. Les fans qui envoient encore de partout des dessins et peintures (dont plusieurs dizaines sont reproduits).

Avec une franchise brute et drôle, sans méchanceté, pourtant, Debbie déballe. La partie post Blondie première période (le groupe séparé en 1982 s’est reformé en 1997), moins documentée que l’histoire de la scène punk new-yorkaise, est la plus instructive. On ne lâche pas cette bio sans concession.

Face It, Debbie Harry, Harper & Collins, 368 p., 20,90 €.

Le rock progressif en 150 groupes

Longtemps mal-aimé, le rock progressif, ou plutôt comme le précise l’auteur le « rock progressiste » (vraie traduction de progressive rock) trouve de nouveaux ambassadeurs et hérauts ces dernières années. Faire du rock une musique plus ambitieuse, trop parfois, est une obsession née à la fin des années 1960. Le parti pris du livre : présenter le mouvement à travers 150 groupes, détaillés chronologiquement (en fonction de leur première sortie), fonctionne pleinement.

Assumant une certaine subjectivité, Dominique Dupuis fait de Zappa un des pionniers dont la genèse est plus habituellement liée à la Grande-Bretagne. Bien entendu, l’attrait de ce type d’ouvrage est d’engranger une masse d’idées d’écoutes au-delà des classiques du genre que sont King Crimson, Genesis, Magma, Yes… Mission pleinement accomplie. Je doute d’être allé écouter Colosseum Live ou Moving Waves de Focus sans avoir été appâté par l’écriture érudite mais pas pédante de l’auteur. Une somme de 2,5 kg, dont on regrettera juste qu’elle passe un peu vite sur les avatars récents du genre.

Prog Rock en 150 Figures, Dominique Dupuis, Éditions du Layeur, 39,90 €.

Toutes les chansons de Queen

Le fonctionnement désormais bien rodé d’une collection devenue emblématique des éditions E/P/A (même si elles n’ont pas inventé le concept). Prenez un artiste ou un groupe star, décryptez toutes les chansons des albums (188 pour Queen). Rajoutez quelques pages pour évoquer des personnages, lieux, moments et objets (dont forcément la guitare Red Special de Brian May) essentiels, injectez un paquet de photos et gardez une mise en page très lisible. Vous obtenez un ouvrage indispensable aux fans de l’artiste.

Ce ne sont pas les prolifiques Jean-Michel Guesdon et Philippe Margotin (auteurs des Beatles, Stones, Dylan, Floyd, Hendrix et tout récemment Springsteen) qui se sont attelés à la tâche, mais un Benoît Clerc, auteur-compositeur dans le civil, et qui s’est montré à la hauteur. Et si huit pages sont consacrées à Bohemian Rhapsody, la signification du texte du morceau culte restera mystérieuse. Selon plusieurs témoignages, Freddie Mercury assurait lui-même n’avoir cherché que la rime, sans se préoccuper du sens…

Queen La Totale, Benoit Clerc, E/P/A. 528p., 49,95 €.

Les objets de Nick Cave

C’est le catalogue de l’exposition coréalisée par la Royal Danish Library, l’Arts Centre de Melbourne et Nick Cave, qui s’est tenue à Copenhague (Danemark). Des photos, des dessins, des peintures, des maquettes de pochettes d’albums ces carnets de notes faits à la main par lui-même, puis créés par un artisan australien, dans lesquels Nick Cave a souvent écrit ses textes. Mais aussi un sac estampillé Kylie Minogue, un buste de Jesus et une machine à écrire. Ces artefacts sont d’abord présentés seuls, en pleines pages, puis commentés à la fin, par Nick ou par le commissaire de l’expo. For fans only, mais génial pour les fans.

Stranger than Kindness, Nick Cave, Michel Lafon, 316 p., 45 €.

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