Rencontre avec Svend Wennick, chasseur de pierres, trader-poète, fournisseur, entre autres, de Marie-Hélène de Taillac.

Chasseur de pierres ? 

C’est un métier technique, un métier de réseau, le genre de métier dont les connaissances se transmettent de père en fils, comme une charge d’Ancien Régime. Un entre-soi qui a l’avantage de perpétuer les traditions. Et l’inconvénient de rendre sourd aux nouveautés. 

Svend Wennick n’est pas un enfant de la balle. Son histoire est singulière et les saphirs qu’il fournit aux joailliers et créateurs de bijoux définissent une nouvelle esthétique de la pierre. Après ses études d’art et de communication au Central Saint Martins College de Londres, il devient architecte et designer. À 30 ans, un voyage en Asie le pousse jusqu’au Népal où une mauvaise météo le cloue au pied des montagnes : “On ne les voyait même pas émerger du brouillard, se souvient-il. Alors j’ai commencé à m’intéresser aux marchands de pierres.” Il y reste trois mois et multiplie ensuite les allers-retours. “Dans le milieu conservateur du commerce des pierres, l’enseignement artistique que j’avais reçu et mon expérience professionnelle m’ont offert un autre regard”, assure-t-il. 

Nous sommes alors au début des années 2000 et l’inconscient collectif est encore marqué par des siècles de tradition qui ont décrété que les saphirs seraient bleus ou ne seraient pas (littéralement «pierre bleue» en hébreu). Le sont-ils réellement ? Pas du tout. Prenez deux molécules d’aluminium, trois d’oxygène, chauffez le tout à mille degrés et voici une gemme d’un bleu profond, intense, ce bleu royal qui a fait le succès du saphir des mines du Cachemire. La recette, élaborée au plus profond de la terre, est infaillible. Mais lorsque la géologie ajoute un peu de fer à la structure chimique de la pierre, elle lui offre des nuances jaunes, le chrome la rend rosée… Autant «d’impuretés», assurent les tenants de l’ancien monde, que la chaleur élimine. Moralité – ou plutôt immoralité –, il n’est qu’à cuire les saphirs pour leur donner la couleur prisée, un procédé qui fait ses preuves depuis plus de deux siècles. Pourtant, ce qui fait la beauté de la pierre, c’est la richesse de ses nuances : “Les jaunes, les roses, les gris, les violets et les infinis tons de bleu, c’est ça que je trouve magique", explique Marie-Hélène de Taillac

À l’heure où Svend Wennick se lance dans le business de la pierre, une nouvelle génération de créateurs bouleverse en effet les codes esthétiques du bijou. C’est aussi l’époque où se multiplient les scandales autour des diamants de sang. “Je voulais savoir d’où venaient les pierres, qui les avait coupées… J’ai donc commencé à aller directement dans les mines”, se souvient-il. Premier arrivé, premier servi : Svend Wennick choisit alors les saphirs pour leur couleur ; les autres se retrouvent ensuite sur le marché à Hong Kong ou Bangkok où elles sont traitées et bien souvent chauffées. À Madagascar, il découvre que les mines offrent des saphirs d’une très grande variété de tons. 

Chaque pierre est unique. Elles sont comme un cadeau de la terre. Mon métier, c’est de partager ce cadeau

conclut-il.

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