Ce mardi 12 mai 2020, « Le Monde en Face diffuse » dans sa case hebdomadaire un documentaire inédit : « Effondrement ? Sauve qui peut le monde ». Un film co-piloté par le grand reporter Alfred de Montesquiou et l’écrivain Julien Blanc-Gras, qui s’intéresse à tous ceux qui se préparent pour la fin du monde, ou du moins, la fin du monde tel que nous le connaissons. Explications.

Comment vous est venue cette idée de vous intéresser à la fin du monde ?

Alfred de Montesquiou (prix Albert Londres 2012 pour ses reportages sur la Lybie) : D’une discussion en déjeunant. Julien (auteur notamment de Briser la glace ou Comme à la guerre) est assez sensible à un certain air du temps, et il avait flairé ou plutôt capté cette idée de s’intéresser à ceux que l’on nomme en gros les survivalistes. Petit à petit, on a évolué et l’on s’est dit que pour faire réfléchir et intéresser le téléspectateur, nous allions aller à la rencontre de ces gens qui se préparent pour la fin du monde, voir comment fonctionne telle ou telle « tribu » puisque ce sont bien des tribus. On trouvait que cette approche nous permettait de nous projeter dans le futur (la fin du monde ?) tout en s’inscrivant dans le présent.

Et par quoi commence-t-on pour tourner ce genre de film ?

Nous avons pas mal tâtonné. Il fallait éviter deux écueils. Le premier, c’était de les prendre trop au sérieux, de ne pas avoir un avis critique, et de filmer ces « effondristes » ou « collapsologues » selon la façon dont on les nomme, comme des prophètes de mauvais augure et susciter d’emblée une réaction de rejet. Le second, c’était de tourner ce film comme un « Bienvenue chez les Zinzins » en ne rendant pas justice aux gens que nous rencontrions. L’émission Le Monde en Face a pour vocation de faire réfléchir. Nous sommes donc partis avec cette idée de filmer des plus pessimistes aux plus optimistes, et il s’est avéré que cela recouvrait aussi une autre double grille de lecture : du plus masculin au plus féminin, et du plus âgé au plus jeune. Ce documentaire commence donc par ceux qui sont les plus riches et qui ont aussi la vision du futur la plus noire, des milliardaires américains qui s’enferment dans des bunkers en pensant qu’ils ne s’en sortiront que par eux même, en s’armant, se surarmant s’il le faut. Et le film s’achève avec des militants écolos en France, un peu baba-cools, qui pensent que seule l’action collective permettra à l’Humanité de réagir.

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Ce film a été tourné avant la pandémie et achevé deux jours avant le confinement, pourtant on y parle du Covid-19. Comment ont réagi les différents intervenants du documentaire pendant cette crise mondiale ?

Choqués. Sidérés pour la plupart, du moins au début. Comme si, ils n’y croyaient pas vraiment. Et puis, ils ont réagi. J’ai l’impression que la plupart voient cette pandémie comme non pas le signe avant-coureur de quelque chose qui va nous arriver, mais comme le signe de quelque chose qui est déjà en train de nous arriver. Et c’est vrai que lorsque l’on voit que l’ONU annonce qu’elle s’attend à de multiples famines de proportion bibliques qui pourraient toucher jusqu’à 300 millions de personnes, oui, il y a de quoi s’inquiéter sur la pérennité de note modèle et de ce que les « effondristes » appellent la fin de la civilisation thermo-nucléaire, en gros la civilisation du confort.

Entre un collapsologue d’extrême-droite et d’extrême-gauche, y-a-t-il beaucoup de différences ?

Ils vont me haïr d’oser dire cela mais c’est frappant de voir tout ce qui les relie. Dans leurs analyses, ils sont très proches. Ce qui change, ce sont les tenants et les aboutissants, la différence d’approche morale et les conclusions qu’ils en tirent.

Interview Frédérick Rapilly

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