Dans "Si tu vois ma mère", Noémie Lvovsky prouve une fois encore toute l’étendue de son talent en incarnant une mère morte… mais terriblement envahissante. Interview.
Si vous deviez présenter cette drôle de maman ?
Noémie Lvovsky : Ce personnage a a été très amusant pour moi à appréhender. Le réalisateur n’arrêtait pas de me dire que je n’étais pas une femme, mais une vue de l’esprit, une projection mentale de mon fils, joué par Félix Moati. Chaque scène était faite d’un mélange de ce que j’aurais fait personnellement si j’étais invisible et de ce que j’imaginais que le personnage de mon fils imaginait lui-même…
Ce n’est pas précisément le style de rôle qu’on vous propose tous les matins !
Oui, mais c’était totalement jubilatoire car je devais jouer le résultat de plusieurs imaginations au pouvoir !
Ce téléfilm est aussi une merveilleuse métaphore sur le deuil. Certaines comédiennes ont apparemment eu peur d’interpréter une morte. Pas vous ?
Comme, pour son fils, cette femme est vivante, j’ai refusé de me poser la question. Certes, la scène de la mort en elle-même a été difficile. Jouer un cadavre, n’est jamais agréable. Physiquement, il faut s’arrêter de respirer, on a peur de ne pas pouvoir y arriver suffisamment longtemps… En outre, par définition, interpréter la mort est forcément de la triche, alors que le but de l’acteur, c’est la recherche de la vérité.
Ou avez-vous puisé pour construire ce personnage à la fois envahissant et débordant d’amour ?
En moi – car j’ai un fils – mais en poussant à fond les curseurs. Il se trouve que cette mère est juive mais, pour moi, ces débordements ne sont pas caractéristiques d’une mère juive. Ils le sont d’une mère tout court. Parce que c’est quand même fou d’être mère !
Ce film vous a-t-il interrogé sur votre propre maternité ?
Tous les jours de ma vie, depuis la naissance de mon fils, je m’interroge sur ma propre maternité. Pas spécialement à l’occasion de ce film. En revanche, il m’a permis de beaucoup m’amuser à faire des trucs que je n’oserais pas faire avec mon enfant. Et ça, c’est très très joyeux !
Vous êtes une des rares comédiennes à transmettre autant les mots que les pensées de vos personnages. Comment faites-vous ?
Pour moi, les pensées sont aussi importantes que les dialogues, peut-être même plus. Pour un comédien, l’état physique, l’état émotionnel, mais aussi l’état psychique sont indispensables dans l’incarnation d’un personnage. D’autant que la caméra peut tout filmer. Il s’agit de s’ouvrir, se donner, dans ce qu’on a de plus profond et de plus mystérieux, même à soi-même.
Savez-vous pourquoi vous jouez la comédie?
Au départ, je suis scénariste et réalisatrice. Je suis venue à la comédie tout simplement parce que j’adore ça. C’est à la fois vrai, réel et ludique. C’est toujours un peu idiot de comparer avec les jeux de l’enfance, mais c’est quand même un peu la source. Quand les enfants jouent à la guerre, ils le font le plus sérieusement du monde, mais ça reste du jeu, donc ça les protège.
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