De somptueux banquets prisés du Tout-Hollywood, un butin digne d’un seigneur du 7e art – 81 Oscars au compteur – et un royaume surnommé la «Colline»… Il fut un temps où Harvey Weinstein régnait en maître sur le monde du cinéma. Jusqu’à ce qu’il soit reconnu coupable de viol et d’agression sexuelle, le 24 février, à l’issue d’un procès historique.

Il aura suffi d’un article dans le New York Times pour que son univers s’effondre comme un château de cartes et conduise à sa condamnation pour viol et agression sexuelle, le 24 février 2020. Une enquête explosive, signée Jodi Kantor et Megan Twohey, publiée le 5 octobre 2017. À la clé, les témoignages de plusieurs victimes présumées du producteur Harvey Weinstein, parmi lesquelles des assistantes et des cadres de son entreprise, ainsi que l’actrice Ashley Judd. Toutes racontent s’être senties mal à l’aise en présence du producteur, quand certaines d’entre elles l’accusent d’agression sexuelle.

La chute d’un empire

Né dans le Queens, à New York, Harvey Weinstein est le fils du tailleur de diamants Max Weinstein. Il étudie à l’université de Buffalo et fonde en 1979 la société Miramax Films, au côté de son frère Robert. (New York, le 21 avril 1989.)

Célèbres dans les années 1980 et 1990 pour leur production de films indépendants – comme ceux de Steven Soderbergh ou Quentin Tarantino – ils remportent leur première Palme d’or en 1990, pour Sexe, mensonges et vidéo. (Avec Robert Weinstein, New York, le 21 avril 1989.)

En 1997, les deux frères raflent leur premier Oscar pour Le Patient anglais, d’Anthony Minghella. Harvey est bien plus présent que Bob sous les feux des projecteurs. (New York, 1994.)

Le tout-puissant Harvey Weinstein est de toutes les soirées mondaines, où se côtoient les grands pontes de Hollywood. (Avec Tom Cruise, New York, le 3 mars 1998.)

La révolte est en marche. Trois jours plus tard, la Weinstein Company renvoie son dirigeant avec pertes et fracas. L’épouse du magnat du cinéma, Georgina Chapman, le quitte dans la foulée. Le 10 octobre, une tribune du journaliste – et fils renégat de Woody Allen – Ronan Farrow, publiée dans le New Yorker, porte le coup de grâce au roi du septième art. En l’espace de quelques jours, le puissant Harvey Weinstein se voit détrôné par un scandale sexuel d’une ampleur jamais égalée.

En vidéo, la bande-annonce glaçante du documentaire sur Harvey Weinstein

Asia Argento – depuis elle-même visée par une sombre affaire d’agression sexuelle – décrit ainsi comment le producteur, indifférent à ses refus répétés, lui a «brutalement» fait un cunnilingus dans sa chambre d’hôtel. Angelina Jolie, Gwyneth Paltrow, Léa Seydoux, Emma de Caunes… des actrices de tous bords s’expriment à leur tour. Mais c’est bel et bien Rose McGowan qui met le feu aux poudres. Elle affirme avoir été violée par le grand ponte de Hollywood, et clame avoir reçu 100.000 dollars en échange de son silence. L’homme dont les films ont remporté 81 Oscars tombe de son piédestal. Sa chute signe l’avènement du mouvement #MeToo.

Les pieds dans le « red carpet »

Difficile de croire que, durant trente ans, le producteur a fréquenté le Tout-Hollywood, multiplié les accolades avec Tom Cruise et pris la pose aux côtés de Madonna, Brad Pitt ou encore Hillary et Bill Clinton. Figure immuable de l’Académie des Oscars, Harvey Weinstein dirige alors la Weinstein Company, une société de production fondée avec son frère Bob, qui fait la pluie et le beau temps à Hollywood. Le red carpet et les dîners mondains n’ont plus aucun secret pour ce Pygmalion du septième art. Harvey Weinstein ignore encore que son nom sera associé à une révolution féministe historique.

Plus de deux ans après l’avènement de #MeToo, Harvey n’est plus que l’ombre de Weinstein. Le producteur hollywoodien comparaissait le lundi 6 janvier devant le tribunal de Manhattan, défendu par l’avocate Donna Rotunno. Au total, cinq chefs d’accusations étaient retenus contre lui : un acte sexuel criminel au premier degré, deux viols et deux «agressions sexuelles prédatrices» («predatory sexual assault» en anglais).

Un peu plus d’un mois plus tard, Harvey Weinstein a été reconnu coupable de viol et d’agression sexuelles. Mais disculpé des accusations de comportement sexuel «prédateur» qui lui faisaient risquer la perpétuité.

*Cet article initialement publié le 13 août 2019 a fait l’objet d’une mise à jour.

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