Imaginez que quatre de vos pièces jouent à Paris, en même temps, après avoir fait salle comble pendant des années. C’est le cas d’Alexis Michalik, prodige du théâtre français qui revient avec sa nouvelle création Une Histoire d’Amour, fruit d’un deuil amoureux. «Un jour, je me suis retrouvé au cœur d’une rupture un peu difficile… j’ai eu envie de raconter ça», confie-t-il, inspiré par la chanson It Takes Time To Be a Man du groupe américain The Rapture.
Sa pièce «parle de l’intime, pas de moi», précise-t-il. «Un auteur, à partir du moment où il écrit quelque chose de sincère, finit toujours par écrire sur ses failles, ses douleurs». Elle raconte l’amour entre Katia et Justine, qui disparaît quelques jours après la naissance de leur fille conçue par insémination artificielle. Pour cette création, Michalik va remonter sur les planches pour jouer le frère de Katia. «C’est terrifiant, ça fait huit ans depuis la dernière fois», souligne celui qui a démarré sa carrière comme comédien.
Le «Wonder boy» de la scène française, comme l’a baptisé la presse, est l’homme aux dix Molières (dont six comme auteur et metteur en scène), à seulement 37 ans. Après environ 8 000 représentations en France et à l’étranger de ses quatre premières pièces, presque sans interruption, il vient de publier son premier roman et sera bientôt à l’affiche de deux films. «Je suis un hyperactif, confie-t-il dans un entretien avec l’AFP. Mon rythme de travail est aussi rapide que celui de mes spectacles».
Il faut croire que depuis sa première pièce Le Porteur d’histoire (2011), toujours à l’affiche après un record de 2500 représentations, jusqu’à Edmond (2016), qui raconte la genèse de la pièce Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand et qui a consacré Michalik comme une «success story», tout sourit au dramaturge aux yeux bleus intenses. En 2018, Vanity Fair le fait même figurer à son palmarès des 50 personnalités françaises les plus influentes du monde.
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Aimant «surprendre» le public, il est adepte des «pièces à tiroirs» et des histoires «où on ne sait pas où on va aller». En France, selon lui, la narration avait été un peu laissée de côté au théâtre jusqu’à l’apparition d’auteurs-metteurs en scène comme Wajdi Mouawad.
Dans un pays où le théâtre privé et le théâtre subventionné sont bien séparés, il se félicite que «depuis quelques années, on assiste à l’émergence d’un théâtre de ‘’lisière’’, qui vient souvent du festival off d’Avignon et qui crée [des pièces] avec une économie réaliste, une narration forte et sans tête d’affiche».
Une recette qui permet selon lui aux pièces de tourner plus longtemps et à l’étranger. Le Porteur d’histoire, avec «cinq tabourets et cinq acteurs», a ainsi tourné de la Nouvelle-Calédonie au Liban et sera bientôt en Chine.
Chantre du théâtre populaire, il sait que, dans certains milieux, on peut regarder de haut ce genre de pièces qui «n’a pas besoin d’aborder des thématiques lourdes ou politiques». «Je ne veux pas que tout le monde aime mes pièces», assure le dramaturge qui a été parfois critiqué pour certaines facilités. «Il y a forcément des gens qui préfèrent un théâtre plus exigeant […] et c’est très bien comme ça.»
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Son premier roman, Loin (Albin Michel), est également un récit à rebondissements: l’histoire d’un jeune homme qui traverse l’Europe à la recherche de son père.
Franco-britannique – sa mère anglaise Pamela Hargreaves a traduit certaines de ses pièces jouées en 2019 en Grande-Bretagne -, il s’est nourri de cette double culture. «Ma narration est plutôt anglo-saxonne mais je parle de sujets très français, révèle-t-il. J’ai piqué cette simplicité à Peter Brook, le côté chorégraphié de Mnouchkine où elle amène tous ses acteurs pour changer le décor mais ma narration emprunte aux séries télé et aux BD. Ça donne des spectacles hybrides».
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