Qu’est-ce qui demeure d’un couple iconique de cinéma, de ceux qui ont autant imprégné les écrans que l’imaginaire collectif, quand ils se retrouvent deux décennies plus tard au générique d’un même film ?
Juliette Binoche et Benoît Magimel, les tourtereaux romantiques et tumultueux, elle Georges Sand, lui Alfred de Musset, des Enfants du siècle de Diane Kurys en 1999, amoureux.ses à la ville, suite à cela, dans les années 2000, partagent aujourd’hui l’affiche de La passion de Dodin-Bouffant, film en lice pour la Palme d’or 2023 réalisé par Tran Anh Hung (L’odeur de la papaye verte, Cyclo, Eternité…).
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À Cannes, un couple assagi
Des retrouvailles sous le sceau de la bonne chère puisqu’il est ici question d’un chef cuistot hors-pair du XIXe, Dodin, qu’assiste, non moins virtuose mais femme de l’ombre, la cuisinière Eugénie. Ces deux-là forment une sorte de vieux couple, « à l’automne de leur vie » comme le dit Dodin même si Eugénie se voit toute sa vie « en été », amant.es à l’occasion mais complices de fourneaux avant tout, qui de vol-au-vent en omelette norvégienne communient autour des plaisirs du palais.
Si les « enfants du siècle » étaient tout feu tout flamme, Eugénie et Dodin se sont bien calmé.es. Ce qui circule alors, entre Juliette Binoche et Benoît Magimel à l’écran, c’est une félicité tranquille et sensorielle, sans trop d’effusions, tout dédiés que sont leurs personnages à leur œuvre commune : on se fait goûter tel fond de sauce, on se passe les plats, l’une retourne un carré de veau pendant que l’autre jette des brassées de légumes dans l’eau bouillante, on se sourit, on s’observe mastiquer, on savoure de concert.
Un ballet de regards, de lèvres, de mains, dans lequel les deux comédien.nes excellent et auquel ils insufflent, qui plus est, une densité intime, comme si la connaissance que Binoche et Magimel ont l’un.e de l’autre, colorait plus encore l’affaire.
Une alchimie de jeux subtile entre Binoche et Magimel
L’Eugénie de Binoche a des petits rires charmants, gentiment ironiques, quand le Dodin de Magimel s’enflamme plus que de raison. Dodin-Benoît a des tendresses et des prévenances pudiques à l’endroit d’Eugénie-Juliette.
Dommage, alors, que la subtile alchimie de leurs jeux soit écrasée par la mise en scène gargantuesque du réalisateur qui, en gros plans façon food porn, aligne sous nos yeux les poissons qu’on vide, les volailles qu’on farcit, les bouillons qui mijotent, les oignons qui rissolent et on en passe, farandole d’images dont l’accumulation, moins qu’appétissante, génère presque, malgré elle, un effet comique.
La passion de Dodin Bouffant de Tran Anh Hung. Avec aussi Galatea Bellugi, Bonnie Chagneau-Ravoire… En salle le 8 novembre.
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