Miou-Miou est une actrice très appréciée et aimée par le public et la critique. Nommée dix fois au César de la meilleure actrice, elle en remporte un pour le film La Dérobade en 1980, cérémonie à laquelle elle ne s’est jamais rendue. Elle a déjà vécu une carrière riche en rôles, en émotions et en rencontres également avec au départ le Café de la Gare et Coluche. Et puis il y a eu ce rôle de femme excentrique et libérée dans Les Valseuses de Bertrand Blier en 1974, qui a séduit les cinéphiles, et ce, à jamais. Elle a toujours fait ce qu’elle souhaitait faire et refuser ce qui ne lui ressemblait pas.
Ce mercredi 29 mars, elle est à l’affiche du film de Jeanne Herry, Je verrai toujours vos visages avec Leïla Bekhti, Dali Bensalah, Jean-Pierre Darroussin, Gilles Lellouche, Fred Testot.
franceinfo : Ce que l’on sait, c’est que Jeanne Herry est votre fille. Est-ce que vous êtes fière de cette petite puce que vous avez eu avec Julien Clerc ?
Miou-Miou : Je n’emploierais pas le mot fierté, je dirais surtout d’être heureuse de voir qu’elle a sa place. Pour l’instant, elle l’a trouvé, elle l’a souvent trouvé. Mais quand je l’ai vue sur le tournage, quand je la vois diriger, être attentive à tout le monde et en même temps très déterminée, très drôle, eh bien, je sais qu’elle est exactement là où elle a envie d’être.
Elle avait déjà signé Pupilles qui avait été nommé sept fois aux César. Ce film raconte la justice restaurative, définie comme un sport de combat. Il s’agit de victimes de braquages, de viols, de vols à l’arraché qui sont marquées, abîmées et qui acceptent de rencontrer des condamnés, en prison, pour créer des moments d’échange avec eux. Vous, vous jouez le rôle d’une de ces victimes qui s’est fait agresser par un homme qui lui a arraché son sac à main. On a le sentiment que personne ne sort indemne.
Les victimes se sentent coupables. C’est ça qui est incroyable. Par exemple, moi qui fait Sabine, elle se sent coupable de ne pas être sortie à la même heure que d’habitude, de ne pas avoir lâché son sac, de ne pas s’en remettre. Et donc, quand elle parle aux coupables, ce sont eux en reconnaissant sa souffrance qui vont commencer à la réparer.
Quand les coupables commencent à reconnaître les souffrances des autres, c’est là où commence le travail de réparation. Le lien social se reconstitue.
à franceinfo
Vous avez très vite eu envie d’être autonome alors, je voudrais savoir simplement à quoi vous rêviez enfant.
J’ai vécu dans le quartier des Halles de Paris, au centre de Paris, où travaillait ma mère. De mon enfance subsistent des images, des sons, puisque toute la nuit, il y avait ce marché absolument incroyable d’odeurs, de cris, de luxuriance. Et ça suivait toute la journée, enfin, ça ne s’arrêtait pas. C’était passionnant. En tout cas, je suis partie à 18 ans chez moi. J’ai claqué la porte et j’ai compris après que construire un café-théâtre et être dans ce lieu donnait une indépendance financière, une liberté extraordinaire.
Ce grand théâtre des Halles, vous avez eu besoin de leur reconstruire ailleurs, de vivre avec du bruit, des odeurs.
C’était peut-être une aventure différente. Une aventure de construire quelque chose, de ne pas savoir où dormir pendant un an, où se laver, qu’est-ce qu’on va manger ? Voler pas mal d’ailleurs puisqu’il n’y avait pas les trucs qui bipaient quand on sortait. Et surtout moi, je n’ai pas fait de casting. Je ne voulais pas être actrice au départ.
Le fait que ce soient les gens qui m’ont désignée comme actrice m’arrange terriblement parce que je n’en ai pas la responsabilité. Ça vient de leur désir.
à franceinfo
Ce qui va vous révéler, c’est le film Les Valseuses de Bertrand Blier. Vous allez montrer votre capacité à incarner un rôle très fort. Il a changé quoi ce rôle dans votre vie ?
Je pense que c’est le succès qui a tout changé. Ça a été un tournage épique vu qu’on s’entendait très bien entre Depardieu, Patrick Dewaere et voilà, ça a été un peu chaud pour toute l’équipe. Et puis après, il y a eu les autres films comme La femme flic d’Yves Boisset en 1980, La dérobade de Daniel Duval (1979).
Ce qui est assez fort quand on regarde ce parcours, c’est que vos partenaires de cinéma ont toujours eu une bienveillance vous concernant, ils vous ont toujours pris sous leurs ailes.
Peut-être que j’attire la protection, c’est ce que moi, je désire. C’est un besoin même. Pas tout le temps, mais quand ça vient, un geste protecteur pour moi… par exemple, ajuster l’écharpe autour de mon cou, j’en ai même eu les larmes aux yeux.
Quel regard portez-vous sur votre parcours ?
C’est pas mal. Ce qui est pas mal, c’est que maintenant moi, je suis rentrée en zone ‘vieillesse’, hein 73 ans donc, j’ai des rôles différents. À chaque étape, il y a des rôles différents.
Comment vivez-vous temps qui passe ?
Bizarrement. J’ai peur, non pas de la mort, j’ai peur de la déchéance. J’ai peur qu’on dise : « Ah, tu n’as pas été la voir aujourd’hui ? » j’ai peur vraiment de cela. Dans ce désir d’être aimée, de continuer à être aimée par mes proches, je n’aimerais pas que ça se gâche. Je trouve que c’est égoïste encore comme pensée !
Comment vivez-vous alors l’amour des Français depuis toutes ces années ?
J’ai eu un peu peur. Comme j’étais un peu leur miroir, qu’ils s’identifiaient beaucoup, j’espère qu’ils ne sont pas déçus, et je ne le crois pas. Je le vis bien en fait.
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