Certains sacres nous reviennent à l’esprit, du tac au tac. Celui de Marion Cotillard, pour sa métamorphose bouleversante dans La Môme. Puis celui de Jean Dujardin, pour son rôle unique dans le multi-récompensé The Artist. Comment oublier son mémorable cri du cœur en clôture de son discours de lauréat ?
Mais avant eux, quelques Francais·es de l’industrie du septième art ont su faire la différence auprès de l’Académie des Oscars. Des actrices, à l’instar de Juliette Binoche, mais également des cinéastes, comme la regrettée Agnès Varda, et même un compositeur, ou plutôt, le compositeur : l’immense Michel Legrand. Rétrospective.
Colette Colbert, première Française à décrocher un Oscar (1935)
Elle fut la première actrice française à être couronnée par Hollywood. En 1935, Claudette Colbert, franco-américaine, se voit remettre l’Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans la comédie romantique aux doux airs de road-movie New York-Miami, aux côtés du célèbre Clark Gable, et réalisé par Frank Capra.
Au cours de sa brillante carrière outre-Atlantique, Émilie Chauchoin, de son vrai nom, a été nommée aux Oscars à deux autres reprises : en 1936, pour son rôle dans Monde privés de Gregory La Cava, puis en 1945, pour sa performance dans Depuis ton départ, un drame sur la guerre, signé John Cromwell.
Simone Signoret, Oscar de la meilleure actrice l’année suivante pour son rôle dans "Les Chemins de la haute ville" (1960)
Un quart de siècle après Colette Colbert, Simone Signoret décroche à son tour l’Oscar de la meilleure actrice, pour son rôle dans Les Chemins de la haute ville du Britannique Jack Clayton.
Le 4 avril 1960, à Hollywood, la comédienne française à la popularité européenne est bouleversée par cette récompense. « Vous ne pouvez pas imaginer ce que cela représente pour moi, en tant que française, vous ne pouvez pas imaginer », répète celle qui a remporté l’année précédente, pour ce même rôle, le prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes.
Dans cette romance dramatique, Simone Signoret incarne Alice Aisgill, une Française et épouse depuis de longues années d’un notable qu’elle n’aime plus lorsqu’elle tombe follement amoureuse d’un comptable de sa troupe de théâtre, joué par Laurence Harvey.
En 1966, l’actrice et écrivaine est à nouveau nommée aux Oscars, pour son rôle dans le drame La nef des fous de Stanley Kramer.
Juliette Binoche décroche l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle dans "Le Patient Anglais" (1997)
Dans son siège de spectatrice de la cérémonie, Juliette Binoche n’en revient pas : l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences lui a décerné l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle, pour sa performance dans Le Patient anglais, réalisé par Anthony Minghella, et qui a obtenu cette nuit-là de 1997, pas moins de neuf Oscars.
Ce film américano–britannique, dont l’histoire se déroule durant la Seconde Guerre mondiale est inspiré du roman L’Homme flambé de Michael Ondaatje.
« Je suis tellement surprise. C’est un rêve ! Ce doit être un rêve français », lance sur scène la comédienne, bouleversée.
Avant elle, en 1964, une autre Française a été récompensée dans cette même catégorie : Lila Kedrova pour son rôle dans Zorba le Grec de Michel Cacoyannis.
En 2000, Juliette Binoche a une nouvelle fois été nommée aux Oscars, et cette fois, dans la catégorie « meilleure actrice », pour son rôle dans la comédie romantique britano-américaine Le chocolat.
Marion Cotillard, Oscar de la meilleure actrice pour son incarnation de "La Môme" Piaf (2008)
« Merci la vie, merci l’amour. » Voilà les mots que Marion Cotillard, chamboulée, parvient à prononcer. Celle qui a déjà obtenu le Bafta et le César de la meilleure actrice pour son incarnation époustouflante d’Édith Piaf dans le biopic La Môme réalisé Olivier Dahan, vient alors de décrocher l’Oscar de la meilleure actrice. L’ultime consécration pour une comédienne française qui comprend ce soir-là que sa vie s’apprête à basculer, et sa carrière, prendre une dimension internationale.
« Qu’est-ce que tu m’as fait Olivier ? (…) Tu as fait chavirer ma vie », lance-t-elle depuis la scène au cinéaste qui lui a offert ce grand rôle. Avant de s’adresser directement aux spectateurs et votants : « C’est vrai qu’il y a des anges dans cette ville [La cérémonie se déroule à Los Angeles, ndlr], merci infiniment. »
Jean Dujardin sacré "Meilleur acteur" aux Oscars avec "The Artist" (2012)
Il est le premier Français, et à ce jour le seul, à avoir été sacré meilleur acteur depuis la création de la cérémonie des Oscars, en 1929.
Pour sa performance dans The Artist de Michel Hazanavicius, son personnage de George Valentin, vedette de cinéma muet des années 1920, Jean Dujardin s’est vu remettre des mains de Natalie Portman la prestigieuse statuette. L’acteur découvert dans Un gars, une fille sort un petit bout de papier, tente d’y lire malgré l’émotion et l’excitation les quelques remerciements griffonnés.
Avant de lâcher : « Si George Valentin pouvait parler, il dirait : ‘Putain, merci ! Génial, formidable ! Merci beaucoup ! I love you ! ». Sa joie explose dans cette conclusion en « franglais », naturelle, mémorable.
Après six Césars, sept Baftas, trois Golden Globes et un Goya, The Artist a raflé cinq statuettes sur ses dix nominations (un record pour un film français) cette nuit-là, dont l’Oscar du meilleur film (aussi une première pour un film français) et celui du meilleur réalisateur.
Autre réalisateur français primé par la mythique institution : Roman Polanski, pour Le Pianiste, en 2003. Le cinéaste franco-polonais visé par de nombreuses accusations de viol, qu’il nie, a contesté la décision de l’Académie des Oscars de l’exclure, mais la justice américaine l’a débouté, en 2019, estimant que la décision de l’organisation était « fondée » et « motivée par des preuves ».
Le travail du réalisateur franco-grec Costa-Gravas a également été salué par l’Académie des Oscars, qui lui attribué l’Oscar du meilleur film étranger pour Z, en 1969, et celui du meilleur scénario adapté, pour Missing, en 1982.
L’Oscar d’honneur à Agnès Varda, première réalisatrice à obtenir ce prix (2017)
Sur scène, elle danse joyeusement avec Angelina Jolie, qui lui tient les mains. Et dans la salle, le tout Hollywood danse avec elles.
En novembre 2017, la photographe, plasticienne et icône de la Nouvelle Vague Agnès Varda, alors âgée de 89 ans, a reçu un Oscar d’honneur couronnant l’ensemble de sa carrière, de son premier long métrage La Pointe courte (1955) au documentaire Les glaneurs et la glaneuse (2000), en passant par Cléo de 5 à 7 (1962). Pour la première fois de l’histoire de la cérémonie, une femme réalisatrice – et pas seulement française – a se voir remettre ce prix d’honneur.
« Je suis intimidée et enchantée d’entendre toutes ces belles paroles sur moi. Je reçois ce prix comme une reconnaissance de mon travail depuis soixante ans, mais aussi comme un coup de projecteur sur le cinéma français », a déclaré l’artiste complète, aujourd’hui regrettée.
Si l’on regarde de plus près, Jeanne Moreau avait été également félicitée pour l’ensemble de sa carrière, en 1998, mais ce prix, qui lui avait été remis par Sharon Stone en dehors de la cérémonie, ne figure pas dans les archives de la cérémonie.
Du côté de la Nouvelle Vague, François Truffaut a décroché l’Oscar du meilleur film étranger en 1974, avec La Nuit américaine. Quant à Jean-Luc Godard, il a refusé de venir chercher son Oscar d’honneur en 2011.
D’autres Français ont décroché cette statuette à part, qui vient féliciter une carrière entière : Charles Boyer, en 1943, après quatre nominations dans la catégorie du meilleur acteur, puis en 1959 le chanteur, acteur et parolier Maurice Chevalier, qui avait déjà été nommé deux fois.
Claude Lelouch, couronné de deux Oscars pour "Un homme, une femme" (1967)
C’est un film mythique, pourtant tourné en trois semaines et réalisé avec peu de moyens. Pour Un homme et une femme, Claude Lelouch a reçu en 1967 deux Oscars : meilleur film en langue étrangère et meilleur scénario.
Dans cette romance dramatique qu’il a réalisé, co-scénarisé, produit, et dont pour laquelle il fut aussi directeur de la photographie, Anouk Aimée et Jean-Louis Trintignant incarnent deux veufs dévastés qui se rencontrent et tombent amoureux.
Un homme et une femme a décroché aussi la Palme d’or du festival de Cannes 1966.
Michel Legrand, trois Oscars pour un compositeur virtuose
Il est le second Français le plus nommé de l’histoire des Oscars, juste après le costumier Jean-Louis Berthault (14 nominations, une victoire).
Sélectionné à treize reprises, le compositeur Michel Legrand a décroché trois statuettes à Hollywood au cours de son impressionnante carrière.
Il a écrit la BO de L’Affaire Thomas Crown de Norman Jewison, dans laquelle figure le cultissime titre Les Moulins de mon cœur, Oscar de la meilleure chanson originale de film en 1969. Trois jours plus tard, il se voit récompenser de l’Oscar de la meilleure musique de film pour Un été 42 de Robert Mulligan, et en 1984, il est couronné dans la catégorie de la meilleure adaptation musicale pour Yentl avec et par Barbara Streisand.
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