Carl XVI Gustaf est à nouveau dans la tourmente. Ses derniers propos, qui sonnent comme un désaveu pour sa fille, la princesse héritière Victoria, placent le roi de Suède dans une fâcheuse posture. Un roi de 76 ans qui s’était fait discret depuis plusieurs années et que les Suédois pensaient plus assagi. À tort.
Château de Drottningholm en Suède. Devant les caméras de télévision de la chaîne suédoise SVT, Carl XVI Gustaf, cravate bordeaux délicatement nouée, pochette ajustée et chemise blanche impeccable, s’exprime en vue d’un documentaire intitulé Les derniers rois de Suède, dont la diffusion est prévue ce jeudi 12 janvier. Sur le ton de la confidence, le roi de Suède va lâcher une véritable bombe. « Je pense toujours qu’il n’est pas judicieux d’avoir des lois qui fonctionnent rétroactivement », a tranquillement déclaré Carl XVI Gustaf, « on peut accepter cela pour la génération suivante. Mais mon fils, le prince Carl Philip, est né et on lui a retiré tout cela. C’est assez étrange. Vous ne pouvez pas faire ça« .
Des propos chocs qui sonnent comme un cruel désaveu pour sa fille, la princesse héritière Victoria. Et le journaliste, étonné par ces propos, de lui demander si le titre avait été injustement enlevé à son seul fils Carl Philip, le roi répond avec gravité : « Oui, je pense que oui. » En Suède, l’affaire fait grand bruit. Il se murmure que le roi, peu à l’aise dans les médias, aurait mieux fait de se taire. L’homme de 76 ans, aux fines lunettes et cheveux blancs, qui s’était fait discret depuis plusieurs années, vient d’entacher lui-même le début de cette année marquant ses 50 ans de règne… Au risque de voir exhumer un passé peu glorieux.
« Casanova » ou « prince coqueluche »
Le 30 avril 1946, un nouveau descendant de la dynastie des Bernadotte voit le jour. Une naissance royale très vite marquée par le drame. Alors que le nouveau-né n’a pas un an, son père, Gustaf Adolf meurt dans un accident d’avion, alors qu’il rentrait d’une partie de chasse. Une disparition, vécue comme un véritable traumatisme pour celui qui est propulsé héritier de la couronne de Suède. Son grand-père, le roi Gustaf VI Adolf, va le prendre sous son aile et sa mère, Sibylle de Saxe-Cobourg-et-Gotha, se montre aux petits soins pour son fils unique, entouré par l’amour de ses quatre grandes soeurs. Isolé entre les murs du palais dès son plus jeune âge, le prince héritier entre par la suite dans une école privée de Stockholm, puis à l’internat. A cette époque, la famille royale n’intéresse que vaguement les Suédois. Tout juste surnomment-ils ce futur roi « Casanova » ou « prince coqueluche » tant il est séduisant et à la réputation de fêtard. Une image qui va lui coller un peu trop à la peau…
En 1973, Carl XVI Gustaf accède au trône de Suède à la mort de son grand-père. Il a 27 ans et la vie devant lui. « Il fait beau jeune homme, bien habillé, d’allure sympathique. Et quand il est devenu roi, il était célibataire. Un homme partagé entre profiter de la vie et répondre aux obligations royales » souffle Lisa Castro, docteure en histoire contemporaine et spécialiste de la monarchie suédoise. Si en public, l’élégant jeune homme semble être un coeur à prendre, que certains imaginent même déjà dans les bras de la princesse Anne d’Angleterre, en coulisses, le jeune homme serait tombé amoureux de Silvia Sommerlath, une belle roturière allemande croisée aux JO de Munich en 1972. Leur idylle reste dans l’ombre, son grand-père Gustaf VI Adolf s’opposant à cette union, puis éclot en 1975 : Carl XVI Gustaf annonce à ses sujets son intention de l’épouser.
La loi salique est supprimée en 1980
Grand uniforme d’amiral pour lui, robe en satin blanc signée Marc Boban de chez Christian Dior pour elle, les deux amoureux se disent « oui » le 19 juin 1976 en l’église du Storkyrkan de Stockholm. Et déjà, le roi semble vouloir faire évoluer la monarchie, et la rendre moins stricte, moins protocolaire. Ne pousse-t-il pas, amusé, le petit garçon d’honneur qui retarde le cortège, et ne chuchote-t-il pas constamment avec Silvia lors de la cérémonie ? Le nouveau roi se veut plus moderne, plus accessible. Au cours de son règne, il mettra fin à la révérence et quittera les ors du palais royal pour s’installer à la campagne, au château de Drottningholm.
Avec la reine Silvia, il aura trois enfants : Victoria, née en 1977, Carl Philip, né deux ans plus tard, et enfin Madeleine, qui voit le jour en 1982. En janvier 1980, Victoria devient la princesse héritière suite à une modification de la constitution qui stipule que le trône de Suède échoit au premier enfant du souverain. Carl XVI Gustaf, un père aimant et un roi apprécié, qui prépare chaque matin le petit-déjeuner et aime concocter des bons petits plats pour ses amis. Sauf que le scandale va venir entacher cette belle image en 2010.
Carl XVI Gustaf au coeur du scandale
Tout a débuté avec la parution du livre Carl XVI Gustaf, Den motvillige monarken (Carl XVI Gustaf, Souverain malgré lui en français ndlr). Trois journalistes évoquent avec force de détails un homme secret, amateurs de plaisirs et de jolies femmes. Fréquentation de clubs de strip-tease, parties fines organisées au palais, et liaison passionnée avec Camilla Henemark, une sulfureuse chanteuse d’origine nigériane du groupe Army of Lovers. En Suède, pays où l’on cultive la discrétion, le choc est énorme. D’autant plus que des photos compromettantes du roi circuleraient sous le manteau… Poussé à s’exprimer lors d’une conférence de presse organisée après une partie de chasse à l’élan, le roi avoue avec gravité que les « situations » décrites dans l’ouvrage ont eu lieu « il y a très très longtemps » et d’ajouter penaud, « j’en ai parlé avec ma famille et avec la reine, nous tournons la page, nous allons de l’avant. » Le monarque, bon père de famille et proche du peuple, qui touchait le coeur des Suédois par son enfance perturbée et sa dyslexie mal soignée, n’attendrit plus personne.
Sa cote de popularité en prend durablement un coup. Surnommé « le roi sans culotte » ou encore le « Berlusconi du Grand Nord », le roi de Suède peine à retrouver grâce aux yeux de son peuple mais également des européens. Lors d’une visite en France en 2014, le monarque est à nouveau raillé. « Le roi et François Hollande ont quelques points communs : les maîtresses et le manque cruel de popularité ! » persifle Thomas Sjöberg, l’un des auteurs du livre qui a provoqué sa chute vertigineuse dans les sondages.
Victoria, princesse héritière, le meilleur atout de la monarchie suédoise
Et alors que 2023 devait être une année hommage à Carl XVI Gustaf, qui fête ses cinquante ans de règne, force est de constater que ses regrets exprimés de ne pas voir son fils lui succéder sur le trône de Suède passent mal. « C’est pernicieux. Il dit trouver difficile qu’on ait enlevé à son fils la possibilité de devenir roi mais il faut rappeler que Carl Philip n’avait que sept mois quand la loi a changé et que ce n’était pas un enfant qui avait été élevé dans l’optique de devenir roi un jour » rappelle Lisa Castro. Pas malin de la part du roi, de dénigrer ainsi sa fille qui jouit d’une belle popularité. Et si à nouveau, comme lors du scandale qui avait entaché son règne en 2010, les Suédois appelaient à son abdication en faveur de sa fille ? « Il n’y aura pas d’abdication. Nous ne sommes pas du tout sur une monarchie décrédibilisée, qui aurait besoin de faire peau neuve, ou face à un souci de santé » explique l’experte.
Tout de suite après avoir tenu ces propos polémiques, le roi a eu l’occasion de s’expliquer, le palais redoutant sûrement une levée de boucliers. « Un prince est né héritier du trône. Une décision a été prise des mois plus tard, établissant de nouvelles conditions. Je pense qu’il l’a bien pris. Je n’ai perçu aucun problème entre eux, ils s’entendent très bien, » a-t-il déclaré, avant de glisser un mot à l’attention de sa fille : « Elle est très engagée, j’ai compris cela. Victoria a déjà conscience de sa responsabilité. » Un rétropédalage qui n’en est pas un. « C’est injuste pour Victoria, mais c’est ce qu’il essaie de corriger maintenant, alors qu’elle est une jeune femme importante. Le fait qu’il en ait parlé est méchant, inutile et non professionnel » analyse de son côté Paul Ronge, expert en relations publiques, dans le journal suédois Aftonbladet.
Le 9 janvier dernier, le roi Carl Gustaf et la princesse Victoria de Suède ont été aperçus tout sourire, bonnets enfoncés sur la tête et bâtons en mains sur une piste de ski de fond à Sälen en Suède. Celle qui est sans conteste le plus bel atout de la monarchie, avec son époux Daniel et leurs deux enfants Estelle et Oscar, représente l’avenir. Et si la princesse héritière a mal vécu les propos tenus par son père à son encontre, elle n’en montre rien. Du moins en public. Une exemplarité qui ne peut être que saluée.
Crédits photos : @BESTIMAGE / DIRECTION ARTISTIQUE GALA
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