• A l’occasion du passage de la tournée de « Drag Race France » à Nice, 20 Minutes a analysé avec les actrices et acteurs locaux de l’évolution de la scène Drag niçoise.
  • D’après les personnes qui travaillent dans ce milieu, la capitale azuréenne fait partie des « meilleures scènes » de France.
  • Récemment, notamment grâce à une meilleure médiatisation, les établissements qui proposent des scènes mais aussi de nouvelles Drag ont connu une expansion.

« La compétition « Drag Race France » a complètement influencé ma façon de voir les Drag, commente Thibault. Dès que j’ai vu un show, je me suis dit que je voulais faire pareil. J’adore ! » Ce Niçois de 29 ans n’a donc pas hésité à prendre sa place quand il a su que la tournée passait dans la capitale azuréenne ce week-end. Avec son amie Melody, ils essaient de suivre chaque semaine leur Drag locale préférée, Millena B Rose, dans tous les endroits où elle performe.

Pour eux, « il y a toujours eu des Drag à Nice, mais ça s’est popularisé récemment, pas qu’ici, grâce aux programmes Ru Paul mis en ligne sur Netflix ». Thibault développe : « J’ai l’impression qu’il y a dix ans, c’était plus caché. L’arrivée de nouvelles Drag et la meilleure visibilité ont aussi dépoussiéré l’image qu’on en avait, je pense. » Même avis de l’autre côté du rideau. Millena B Rose trouve aussi que les endroits où se déroulent les shows sont parfois « un peu vieillots ».

Nice, « the place to be »

Ce soir, cette star locale de 22 ans teste pour la première fois la scène des Folies d’Edmonde, un nouveau bar de la vieille ville. « J’espère que ça pourra devenir un endroit où les gens ont envie d’aller, que ce nouvel endroit va donner un nouveau souffle et va permettre d’avoir le coup de projecteur qu’on mérite », s’exclame Millena B Rose. D’après elle, c’est ce qui manque à Nice. « Le problème sur la Côte d’Azur, ce n’est pas l’implantation ou la multiplication des lieux pour Drag, au contraire », ajoute-t-elle.

L’artiste ne performe qu’à Nice et est « très contente ». « S’il y avait un classement des meilleures scènes en France, je mets facilement Nice dans le Top 3 ». Comme arguments, elle avance le nombre de bars et de clubs qui proposent des shows très régulièrement. Deux amis, Cédric et Fabrice, venus la voir et très proche du milieu, appuient : « Pendant l’été, tous les Drag de France débarquent à Nice. C’est plus qu’un très bon tremplin, c’est THE place to be. » Millena B Rose ajoute : « Au moment où j’ai commencé en tant que professionnelle, à 18 ans, les Drag niçoises qui étaient présentes avaient fait un très bon travail et étaient bien intégrées dans la communauté LGBTQIA + locale et respectées comme des divas. Ce qui n’était pas forcément le cas dans d’autres villes. »

Pour Kris et Ben, propriétaires de l’Omega Club, une boîte qui propose depuis son ouverture en 2018 des shows Drag, cette « réputation », s’est créée « depuis longtemps ». « Aujourd’hui, il y a beaucoup de nouveautés, notamment liées à Ru Paul et Drag Race, mais localement, on était en place bien avant, expliquent-ils. Il existe un gros tissu local. A Nice, il n’y a pas de grosses choses, mais il y a beaucoup de choses avec un format qui permet d’être constant toute l’année. Et récemment, il y a aussi eu beaucoup de professionnalisations. On fait venir des personnes et nos Drag s’exportent aussi et ont une vraie notoriété. On a deux copines qui ont été bookées aux Etats-Unis à Los Angeles et Miami. »

Le nombre de professionnelles a triplé en cinq ans

C’est aussi le cas de Saphyre, qui passe son temps à faire des allers-retours entre la Côte d’Azur et Genève. Elle estime aussi « avoir de la chance à Nice pour faire son métier ». « Par rapport à d’autres villes, on peut être heureuses d’avoir plusieurs établissements où faire nos shows ». Avec plus de cinq ans de pratique, elle fait bientôt partie des plus « anciennes » de la nouvelle génération de Drag niçoises. « Moi j’ai connu ce milieu grâce au bar Bitch, place Rossetti, il y a huit ans. C’était pratiquement le seul bar [qui n’existe plus désormais] où il y avait des shows. » En parallèle de cette explosion de scènes, elle constate une multiplication de « nouvelles ». « Elles devaient être cinq avant que je ne commence, on doit être entre dix et quinze en tant que professionnelles désormais. »

Toutes les personnes interrogées soulignent l’importance des concours pour réussir en tant que Drag. « C’est grâce aux concours que je suis devenue professionnelle », explique Millena. Aujourd’hui, elle est elle-même membre d’un jury pour déterminer quelle sera la « meilleure baby drag », une débutante, du concours du Swing. Cédric et Fabrice aussi sont devenus Drag grâce à ce genre de compétition. Pour Melody, c’est grâce à ces événements locaux ou médiatisés, « qu’on casse le cliché de la Drag comme un monstre dans la cave un peu cringe et on met en avant les aspects de spectacle avec le maquillage, les danses. On se dit maintenant que la star devant laquelle on s’extasie ce soir, ça peut être la « girl next door » [comprendre le ou la voisine d’à côté] ».

Saphyre, également professionnalisée grâce à un concours de talents, appuie : « Grâce à Netflix, les gens se sont rendus compte qu’on n’était pas juste des hommes qui s’habillent en femmes, que ce n’était pas malsain mais un vrai métier, une vraie passion. » Thibault complète : « Le gros avantage de « Drag Race France », c’est que ça a permis de créer une mode autour du concept et que des personnes qui n’étaient pas de la communauté LGBTQIA + s’y sont intéressées. Après, à voir si, comme toutes les tendances, ça ne va pas retomber. » Pour les propriétaires de L’Omega, il faut surtout faire attention « à ne pas s’étouffer ». « Il ne faut pas pousser à l’excessif sinon ça va exaspérer tout le monde ». En attendant, un artiste de la tournée Drag Race sera présent à la boîte dès la fin du show à l’Acropolis.

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