- Annie Ernaux, connue pour ses romans autobiographiques Les Années ou L’Evénement, a reçu ce jeudi le prix Nobel de littérature.
- L’écrivaine française a salué « un très grand honneur » mais aussi « une grande responsabilité » qui lui est donnée afin de témoigner pour la « justesse et la justice ».
- C’est la première femme française sur seize lauréats tricolores à recevoir ce prix dans l’histoire du Nobel de littérature
Quand Annie Ernaux écrit sur sa vie, elle la raconte dans un style impersonnel qui donne à son récit une force collective et à son style une valeur universelle. Si vous avez lu Les Années (2008) son livre le plus connu sur son enfance et sa jeunesse, ou vu au cinéma récemment L’événement (2000), d’après le récit de l’avortement clandestin qui fut le sien, mais aussi celui de milliers de femmes dans la France des années 1960, vous comprendrez pourquoi le Nobel de littérature a fini par couronner cette écrivaine française de 82 ans pour « le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle », comme l’a expliqué le jury ce jeudi à Stockholm.
« Grand honneur et grande responsabilité »
Jointe par la télévision publique suédoise, la lauréate a salué « un très grand honneur » mais aussi « une grande responsabilité » qui lui est donnée pour continuer à témoigner « d’une forme de justesse, de justice, par rapport au monde ».
Avec sa prose cristalline, Annie Ernaux était depuis longtemps pressentie pour remporter le prix, mais sans jamais faire figure de grande favorite. Si bien qu’elle a assuré que c’était pour elle une grande « surprise ». Pour les bookmakers aussi, face à Michel Houellebecq ou à la Canadienne Anne Carson, placés en tête des pronostics ce jeudi matin. Sans parler des postulants plus « politiques », comme l’auteur des Versets sataniques menacé de mort Salman Rushdie ou la dissidente russe exilée à Berlin Ludmila Oulitskaïa.
Alain Raimbault, un des lecteurs-contributeurs de la plateforme 20 Minutes Livres, est en tout cas ravi : « Annie Ernaux ! Waouh ! Quand j’ai lu La Place, je me suis identifié au personnage de l’enfant qui va aimer les Lettres, devenir enseignant, et s’éloigner des valeurs de sa famille. C’est tout moi. Je suis bien content de ce Nobel, qui me surprend un peu car je ne pensais pas que sa renommée était si grande. Modiano m’avait surpris aussi pour les mêmes raisons. Mais pas Le Clézio qui a toujours été un géant pour moi. Annie Ernaux, je la vois plutôt comme une grande sœur… »
Une œuvre simple, mais sans concession
Annie Ernaux restera comme la première femme primée parmi seize lauréats français. Mais à travers elle, c’est « une œuvre sans concession et écrite dans un langage simple, propre », qu’a voulu récompenser le jury comme l’a souligné l’Académicien Anders Olsson jeudi. « Quand Annie Ernaux met au jour, avec courage et acuité clinique, les contradictions de l’expérience sociale, décrivant la honte, l’humiliation, la jalousie ou l’incapacité à voir qui l’on est, elle accomplit quelque chose d’admirable et qui s’inscrit dans la durée », a-t-il ajouté.
L’œuvre de cette professeure de littérature à l’université de Cergy-Pontoise compte une vingtaine de récits dans lesquels elle dissèque le poids de la domination de classes et la passion amoureuse, puisant dans sa propre vie pour raconter l’intimité d’une femme et son évolution au gré des bouleversements de la société française depuis l’après-guerre. Parmi les plus marquants : Des armoires vides (1974), La Place (1982), L’événement (2000), Les années (2008) et plus récemment Mémoire de filles (2018) ou Le jeune homme (2022), tous parus chez Gallimard.
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