Elles sont maintenant une trentaine à accuser l’ancien animateur Patrick Poivre d’Arvor de violences sexuelles. En septembre 2022, deux nouvelles plaintes ont été déposées à l’encontre de la star du 20h de TF1, pour un viol et des agressions sexuelles, révèle Libération mardi 20 septembre.
Une troisième accusatrice a également fait un signalement auprès du procureur de la République pour des faits de viol. C’est ce magistrat qui est en charge de l’enquête préliminaire ouverte sur PPDA. Le quotidien national a rencontré ces trois femmes, toutes issues de l’industrie de l’édition, qui désignent l’ex-journaliste télévisé et auteur.
- Affaire PPDA : 20 accusatrices font bloc et témoignent d’agressions et viols sur le plateau de Mediapart
- « Complément d’enquête » sur PPDA : témoins et accusatrices racontent la toute-puissance du présentateur star de TF1
Le bureau de PPDA, décor récurrent de l’affaire
Elles témoignent, de façon similaire aux 27 autres accusatrices de l’affaire PPDA, de l’omerta autour de la figure du PAF et de son impunité. « Je n’ai eu cesse de relater ses actes, personne n’a jamais été choqué », assure pour sa part la journaliste et écrivaine Bénédicte Martin, 44 ans. Dans Libération, elle a décrit, déjà dans une enquête publiée en décembre 2021, une agression sexuelle qui se serait déroulée en novembre 2003 dans le bureau de l’animateur à TF1.
Plusieurs autres plaignantes ont désigné cette pièce comme le théâtre d’agressions sexuelles récurrentes, souvent après l’enregistrement du JT, auxquelles plusieurs ont été invitées à assister. PPDA serait donc un adepte du « coup du bureau » surnommé ainsi par des accusatrices citées par Libération.
Bénédicte Martin a porté plainte le 12 septembre 2022, explique-t-elle aujourd’hui au média, dans l’espoir que son témoignage aide d’autres victimes, bien que les faits qu’elle dénonce tombent sous le coup de la prescription. L’autrice avait 24 ans au moment des faits.
Dans le bureau donc, ce soir de novembre 2003, la jeune femme s’entretient avec PPDA. Au cours de la conversation, celui-ci l’aurait comparée à sa fille Solenn. Comme elle, Bénédicte Martin souffrait alors d’anorexie. « Les filles anorexiques sont souvent très intéressantes, très sensibles. J’aimerais vraiment vous aider à vous alimenter », lui aurait lancé l’hôte à TF1. Puis, décrit la plaignante, le journaliste vedette lui aurait fait une clef de bras pour l’immobiliser. Tombée par terre, la jeune femme aurait tenté de se dégager tandis que PPDA l’embrassait et remontait sa jupe.
Dans la panique, Bénédicte Martin raconte avoir détourné l’attention du présentateur en lui demandant de poursuivre l’acte au cours d’un autre rendez-vous, plutôt que sur le sol de son bureau. Profitant que celui ci se munisse d’un calepin, la jeune femme aurait pris la fuite.
L’indifférence du milieu de l’édition
Quelques jours plus tard, dit-elle, elle raconte sa soirée à son éditeur et son attachée de presse, dans les locaux Flammarion. Mais on ne la prend pas au sérieux, d’ailleurs Frédéric Begbeider lui aurait ri au nez : « C’est normal, tu es une fille. » Autour d’elle, décrit Bénédicte Martin, personne ne semble étonné, pas même Michel Houellbecq qui passe par là et lance : « rien ne change ». Son attachée de presse, elle, lui fait comprendre que c’est habituel : « Il est comme ça, Patrick, tout le monde le sait. Tu t’attendais à quoi ? Si tu veux écrire, il y a des passages obligés… Toutes les jeunes filles y sont passées. »
Une deuxième plaignante, journaliste et écrivaine également, anonymisée par Libération sous le prénom Juliette, raconte avoir été violée par PPDA, toujours dans son bureau, après avoir participé à son émission Vol de nuit en 2000. L’animateur l’aurait pénétrée rapidement contre son gré, sans qu’elle puisse réagir. De par son métier l’autrice recroise souvent Patrick Poivre d’Arvor, décrit-elle au journal, et finit par tisser une amitié très corporate avec lui. Juliette explique avoir voulu enfouir l’agression.
Quand elle apprend l’ouverture d’une enquête préliminaire en 2021, elle décide de sortir du silence et d’écrire au procureur de la République. Une première enquête avait été classées sans suite par le paquet de Nanterre en juin de cette année-là. 23 femmes avaient alors témoigné, mais la majorité des faits étaient prescrits. Parmi elles, l’écrivaine Florence Porcel, qui accuse PPDA de viols pendant une relation sous emprise selon elle. Les enquêteurs avaient estimé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves pour poursuivre l’animateur.
L’animateur accusé de viol sur une mineure
Une troisième plaignante s’est également exprimée dans Libération, Margot, anciennement Anne, Cauquil-Gleizes, décrit un viol dans une chambre d’hôtel de Sète alors qu’elle est âgée de 16 ans. Le journaliste lui aurait donné rendez-vous en prétextant vouloir discuter des textes de l’adolescente. « Il me bascule sur le lit, me déshabille, me pénètre. Ça dure cinq minutes à peine. Je reste complètement passive, je ne comprends pas ce qui m’arrive », témoigne-t-elle auprès du quotidien.
Margot Cauquil-Gleizes assure qu’une fois la majorité atteinte, elle a souffert de dépression à la suite des événements. Quand elle voit le passage du journaliste, venu étalé sa défense dans l’émission Quotidien du 3 mars 2021, elle a un déclic : « L’entendre dire que jamais il n’avait contraint aucune femme, je ne l’ai pas supportée. J’ai explosé. »
Elle a déposé sa plainte le 9 septembre 2022 à Paris : pour le viol qu’elle dénonce dans la chambre d’hôtel, et puis pour une agression sexuelle, qu’elle situe entre 1991 et 1992. Là encore, l’accusatrice était invitée dans son bureau lorsque, dit-elle, PPDA aurait tenté de la contraindre à une fellation. Elle aurait réussi à se débattre.
Aujourd’hui, et depuis fin juin 2022, la chambre d’instruction de la cour d’appel de Versailles se penche toujours sur les faits prescrits.
Source: Lire L’Article Complet