Elles sont 188. Elles sont artistes, élues, personnalités publiques et féministes. Parmi elles : l’actrice Adèle Haenel, la vice-présidente PS du Sénat Laurence Rossignol, la conseillère de Paris EELV Alice Coffin, la députée LFI Clémentine Autain, ou encore la journaliste Stéphanie Khayat, qui a porté plainte contre Patrick Poivre-d’Arvor pour viol.

La constante mise en doute de la parole des femmes

Dans une tribune publiée dans Le Monde lundi 20 juin 2022, ces 188 femmes « de tous milieux professionnels, de tous bords politiques » demandent la « démission immédiate » de l’actuel ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées Damien Abad, visé par des accusations de violences sexuelles.

« Damien Abad peut-il, comme ses fonctions le requièrent, incarner l’intérêt général ? », questionnent les presque 200 signataires dans ce texte à l’initiative de l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, constitué à la suite du mouvement #MeTooPolitique, et du collectif #NousToutes. « Le peut-il, alors que trois femmes l’accusent de viol ou de tentative de viol et que de nombreuses personnes, y compris des élus de la République, ont témoigné de comportements tout à fait inappropriés ? », interrogent-elles encore, en référence aux témoignages publiés par Mediapart le 20 mai puis le 15 juin 2022.

Auprès du site d’investigation, une élue centriste a fait le récit d’une tentative de viol lors d’une soirée à son domicile, une ex-militante centriste a révélé avoir déposé plainte pour viol – classée sans suite -, et une autre femme a indiqué avoir signalé à l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique « des faits de viol ». La première et la troisième pensent avoir été droguées.

Si des ministres peuvent agir en toute impunité, un blanc-seing semble être envoyé à tous les autres.

Pour ces 188 femmes, le maintien de l’homme mis en cause au sein du gouvernement est « le symptôme de la grande résistance qu’opposent les réactionnaires aux femmes qui prennent la parole depuis des années et peinent à être entendues », ainsi qu' »un symbole qui impacte la société tout entière ».

Un gouvernement « lâche » et « complice »

Le gouvernement fait non seulement « preuve d’une grande lâcheté », écrivent-elles, car « ce n’est pas une décision judiciaire qu'[elles lui demandent] de prendre, mais bien une décision politique ». Il est aussi est aussi « complice », puisqu’il envoie ce message aux agresseurs sexuels : « Si des ministres peuvent agir en toute impunité, un blanc-seing semble être envoyé à tous les autres ».

Dans une entreprise, si une personne accusée de harcèlement sexuel était protégée par son employeur, maintenue en poste, sans enquête interne, sans mesure de prévention, sans mise à pied conservatoire le temps qu’une enquête soit déployée, la responsabilité de l’entreprise pourrait être engagée.

« Dans une entreprise, si une personne accusée de harcèlement sexuel était protégée par son employeur, maintenue en poste, sans enquête interne, sans mesure de prévention, sans mise à pied conservatoire le temps qu’une enquête soit déployée, la responsabilité de l’entreprise pourrait être engagée. (…) Pourquoi les ministres seraient-ils au-dessus des lois qui s’imposent à l’ensemble de la société ? », poursuivent les signataires.

Pas les seules à interroger la présence de Damien Abad au gouvernement

Les 188 femmes relèvent qu’elles ne sont pas les seules à réclamer la démission du nouveau ministre accusé : « Sur le terrain, le président de la République et la première ministre ont tour à tour été interpellés par des femmes qui expriment leur colère et soulignent le mépris renvoyé par le gouvernement aux victimes ».

Mercredi 15 juin 2022, soit six jours après que le Président de la République ait été questionné par une lycéenne quant aux nominations de Damien Abad et Gérald Darmanin, tous deux ministres accusés de viol, la Première ministre a été sommée de s’expliquer sur ce même sujet par une riveraine.

Le texte rappelle qu’un viol est commis toutes les six minutes en France, et qu’un féminicide par un conjoint ou ex-conjoint, tous les deux jours et demi. 

« Pour traiter cette question de sécurité et de santé publique, il est urgent de créer un climat de confiance dans nos institutions », appuie-t-il.

Dimanche 19 juin, le ministre Damien Abad a été réélu député dans l’Ain, avec 57,86% des voix face à la candidate Nupes.

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