Lundi 30 mai 2022, lors des 8ème de finale du tournoi de Roland-Garros, la joueuse chinoise Qinwen Zheng (74e mondiale), s’est inclinée face à la Polonaise, et numéro 1 au classement WTA, Iga Swiatek (6-7 (7/5), 6-0, 6-2).
Si la tenniswoman de 19 ans est apparue blessée à la cuisse lors du match, ce n’est pas une douleur musculaire qui a gêné la performance de la joueuse, mais ses dysménorrhées.
“Plus le match avançait, et plus j’avais des douleurs au ventre. Je voulais me battre, je le voulais vraiment mais je n’avais plus la force donc c’était vraiment difficile. Je n’ai pas pu montrer mon tennis dans les deuxième et troisième sets”, a-t-elle confié en conférence de presse, quelques heures après le match, comme le rapporte L’Équipe.
« J’aimerais être un homme sur le court dans ce genre de moments »
Malgré la douleur, la Chinoise est parvenue à arracher le premier set à son adversaire, qui n’avait pas perdu un set depuis le 23 avril 2022, comme le rappelle RMC Sport.
“Dans le premier set, j’ai juste essayé de jouer mon jeu. J’étais capable de vraiment être là et d’avoir la bonne attitude”, commentait-elle en début de conférence de presse.
C’est après ce premier effort intense que la joueuse accuse une “baisse de régime”. Elle revient sur le court avec un bandage à la cuisse, mais dévoile plus tard la vraie raison de son changement de jeu : ses règles douloureuses.
“C’était aussi compliqué avec la jambe mais ce problème-là était facile comparé à ce que je ressentais au ventre. C’est juste des trucs de filles. Le premier jour, c’est toujours dur. Mais je dois jouer avec cette grosse douleur du premier jour. Je ne peux pas aller contre ma nature. J’aimerais être un homme sur le court dans ce genre de moments. Je n’aurais pas à souffrir de ça”, reprend L’Équipe.
L’impact des règles sur la performance des sportives
Si les règles sont peu discutées dans le monde du sport, elles ont pourtant des réelles conséquences sur les performances des sportives. En 2017, L’Équipe publiait une enquête à ce sujet. À l’occasion, le magazine avait recueilli les témoignages de plusieurs grands noms du sport féminin, comme Charlotte Bonnet, Emily Thouy ou Sarah Ourahmoune.
Selon une étude menée par Dr Carole Maître, gynécologue à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), en 2008-2009 et citée par Libération, « 37% des sportives considèrent la douleur des règles comme une gêne à leur activité nécessitant un traitement, et 64 % pensent que le syndrome prémenstruel diminue significativement leur performance« .
« On a plus de consultations sur le sujet. Depuis environ cinq ans, on en parle plus, il y a une certaine médiatisation mais aussi une formation des staffs et une sensibilisation de la nouvelle génération des entraîneurs à la performance au féminin. Il y a une évolution, même si on ne parle jamais trop des spécificités du corps féminin. On pourrait aussi parler des problèmes de périnée, par exemple », expliquait-elle à La Nouvelle République en 2020.
Au-delà des symptômes physiques (maux de ventre, céphalées, manque d’énergie et de sommeil…), c’est aussi une “parano” qu’évoquaient plusieurs sportives, comme la nageuse Charlotte Bonnet qui expliquait “penser à changer de tampon, savoir si ça ne va pas couler, c’est très pénible”.
Les menstruations : le “dernier tabou du sport”
Si cette prise de parole est rare, elle reste pudique. Jamais, dans son récit, Qinwen Zheng n’a utilisé le mot “règles”.
Encore taboues, les menstruations n’ont été – réellement – adressées dans le monde du sport qu’en 2016, lors des Jeux Olympiques de Rio. Interrogée sur sa contre-performance au relais 4 x 100 mètres féminin, la nageuse chinoise Fu Yuanhui avait expliqué au micro de CCTV “C’est parce que j’ai eu mes règles hier, donc je suis particulièrement fatiguée », comme le relayait, à l’époque, Libération.
Sur les réseaux sociaux nationaux, sa déclaration avait fait couler beaucoup d’encre. Car, comme le soulignait The New York Times, en Chine, “on reçoit ‘une visite de sa tante’ ou on ‘prend une pause’, mais on ne dit pas qu’on à ses règles ».
En France, les sportives souffrent de ces non-dits. Ainsi, la judokate quintuple championne du monde, Clarisse Agbegnenou s’était associée à la marque de culottes de règles française, Réjeanne, en juin 2021.
“J’avais envie de produits qui permettent de faire du sport et de rester féminine, ce n’est pas parce qu’on a nos règles qu’il faut mettre des grosses culottes. On peut être sexy et rester une femme, même pendant le cycle menstruel ! » La championne est plutôt cash : « combien de fois pendant les entraînements j’ai dû aller aux toilettes pour me changer, par peur des taches sur mon kimono blanc…”, témoignait-elle auprès du Parisien.
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