“Si je ne l’ai encore jamais eu après tout ça, je pense que je ne l’aurai jamais”. Pendant que certaines personnes multiplient les tests PCR positifs depuis 2020, et que le nombre de cas quotidiens liés à Omicron faiblit à peine en France, on estime qu’un.e Français.e sur deux n’aurait (toujours) pas contracté le Covid-19 depuis le début de la pandémie.

Vitamine D, solitude et même tabac… En deux ans de pandémie, les études tentant d’expliquer ce qui pourrait avoir protégé certaines personnes du virus se sont succédées. Deux ans plus tard, les quelques épargnées par le virus -qui n’ont en tout cas jamais identifiées officiellement comme positives- en viennent à se demander ce qui les protège. Et nous aussi.

Est-il possible que quelques cas particuliers, dont on n’aurait pas encore percé le secrets, bénéficient d’une immunité innée face au Covid-19 ?

Éléments de réponses avec Océane Sorel, docteur en virologie et animatrice du compte Instagram @thefrenchvirologist. 

Marie Claire : Comment expliquer qu’après deux ans de pandémie, on rencontre encore des personnes qui semble être passées entre les mailles du filet face au virus ? 

Océane Sorel : Dans le cas du Covid-19, il y a plusieurs cas de figure possibles : soit ces personnes n’ont toujours pas contracté le virus simplement parce qu’ils ne l’ont pas encore rencontré, soit c’est le vaccin qui leur a conféré l’immunité suffisante pour se protéger de l’infection. Ou alors, ils n’ont pas eu de symptômes, mais ont bien été infectés sans le savoir.

Ne pas avoir encore été contaminé par le virus ne peut pas être un prétexte pour se sentir invincible. L’immunité absolue contre tous les pathogènes qui permettrait de ne jamais tomber malade n’existe pas.

Doit-on en déduire qu’une immunité « innée » empêchant l’infection au Covid-19 est strictement impossible ?

Il y a quand même des personnes dites « naïves » (non-vaccinées ou sans historique d’infection antérieure par le virus) qui n’ont manifestement jamais contracté le virus malgré le fait d’avoir été en contact avec des personnes infectées. Pour l’heure, on ne sait pas vraiment l’expliquer.

Il y a beaucoup d’autres coronavirus : si l’on a déjà été infecté par un autre de ces virus similaires au Covid-19 auparavant, cela peut potentiellement fournir un certain degré d’immunité (…)

Les scientifiques se penchent sur la question actuellement et voient plusieurs hypothèses mais pas de certitudes encore établies : les raisons peuvent être génétiques ; soit c’est une question de protections croisées.

Il y a beaucoup d’autres coronavirus : si l’on a déjà été infecté par un autre de ces virus similaires au Covid-19 auparavant, cela peut potentiellement fournir un certain degré d’immunité contre le SARS-CoV-2. Des recherches sont en cours concernant ces hypothèses. 

De manière générale, comment s’immunise-t-on face à un virus ?

D’abord, il faut dire qu’il y a plusieurs degrés d’immunité : l’immunité stérilisante, qui empêchera le virus de rentrer et l’immunité qui protège contre le développement d’une maladie, ou protège contre les formes sévères de cette maladie, qui agit contre la maladie et les formes sévères.

Mais pour être immunisé, il faut que l’organisme sache à quoi le virus ressemble et s’en souvienne. C’est ce qu’on appelle l’immunité mémoire.

Ce n’est pas parce qu’on mange bien et qu’on prend des compléments alimentaires que l’on n’attrapera pas le virus.

 C’est à ça que sert la vaccination d’ailleurs : on injecte une partie du virus, pour qu’au moment où le corps rencontre le virus qui cause le COVID-19, le système immunitaire se souvienne de lui et le combatte. Avec les nouveaux variants, on le voit, le vaccin est moins efficace dans la prévention de l’infection par le virus. Par contre, il protège toujours très bien contre les formes graves.

On a entendu des personnes affirmer qu’elles n’ont pas été infectées parce qu’elles auraient un « bon système immunitaire », boosté par diverses cures de vitamines. Scientifiquement, est-ce que c’est plausible ?

Prendre de la vitamine D n’empêchera pas l’infection. Cela peut potentiellement aider le corps à combattre le virus, mais ce n’est pas miraculeux.

Déclarer avoir un “bon” système immunitaire sous prétexte de prendre des compléments ou d’avoir une bonne hygiène de vie, n’a pas grand-chose à voir avec le risque d’être infecté ou non.

La vaccination reste irremplaçable pour se protéger contre la maladie.

C’est une fausse croyance que j’essaie de combattre avec mon compte Instagram : ce n’est pas parce qu’on mange bien et qu’on prend des compléments alimentaires que l’on n’attrapera pas le virus.

La vaccination reste irremplaçable pour se protéger contre la maladie. Si les vitamines suffisaient, tout le monde en prendrait et personne n’aurait besoin de se faire vacciner. 

En tant qu’animatrice d’un compte de vulgarisation scientifique, comment réagissez-vous face à l’explosion de ce type d’affirmations sous vos posts ?

Je ne veux pas que mes followers confondent politique, science et opinion. Si les gens sont étonnés par ce que j’explique, alors ils peuvent toujours consulter les sources que je mets à disposition. S’ils ont des interrogations, j’y réponds.

Mais je n’ai pas le temps pour les personnes agressives, qui posent des questions détournées visant à distiller de la désinformation, ou qui ne croient pas à ce qui est prouvé scientifiquement. Je ne peux pas convaincre tout le monde, je n’oblige personne à faire quoi que ce soit et parfois, je suis obligée de bloquer certains comptes. 

Source: Lire L’Article Complet