Elle a 30 ans dont sept passés dans la police. Mais ça, c’était avant. En 2016, Fanny Diercksen est devenue Phanee de Pool (prononcer Fanny). Musicienne autodidacte, auteure, compositrice et interprète, elle a inventé son style et son phrasé. Elle appelle ça le « slap », un genre entre le rap et le slam qu’elle distille de sa voix claire sur des textes affûtés.

Un style et un univers qu’elle a déployés sur un album, Hologramme, sorti en 2017. Un autre est prêt à sortir. Rencontre avec une artiste attachante et spontanée que son métier de policière a marqué.

Case police

Née à Bienne (dans le Jura bernois, en Suisse) dans une famille d’artistes (un papa homme de radio et créateur de spectacles de music-hall, une maman pianiste concertiste et conceptrice de marionnettes), Fanny avait tout pour devenir une saltimbanque. Mais la vie a voulu qu’elle passe d’abord par la case école de commerce (à Saint-Imier) et plus tard, la case police. Pour assumer ses envies d’indépendance, la jeune femme passe le concours et le réussit.

Elle passe six années en poste à Moutier puis Bienne. Elle côtoie les accidents, les homicides, les suicides. De quoi imprimer durablement des images douloureuses dans sa rétine et son âme. « J’étais une râleuse et une chouineuse. J’étais toujours en train de me morfondre.

En passant par la police, je me suis rendue compte que tout va bien. Parce que quand on est confronté au pire, on arrive à réaliser qu’on a le meilleur.Phanee de Pool

Elle dit qu’avant, elle « avait une image négative de ce métier. J’ai maintenant pour lui un respect absolu. » Mais en 2016, elle jette l’éponge et décide de se consacrer à la musique, sa passion de toujours.

Marcher différemment

Son répertoire, elle le construit seule, avec ses lacunes. Car Phanee n’a aucune formation musicale. Elle a voulu apprendre le jazz dans une école à Lausanne, mais le solfège et les gammes ont eu raison de sa motivation au bout d’un an. Elle a contourné le problème et trouvé ses propres solutions.

« Je suis maligne à ma manière. Je dirais plutôt démerde car quand on ne maîtrise pas les trucs techniques, on apprend à marcher différemment. Sur mon clavier, j’ai plein d’autocollants pour savoir où je dois mettre mes doigts pour commencer mes accords ! Mais je me suis créée un setup qui me correspond. »

Lucidité et poésie

Côté écriture, son ancien métier va la nourrir. Les paroles de ses chansons s’inspirent, entre autre, de choses vues lors des interventions. Un mélange de lucidité et de poésie. Illustration avec Des miettes sur le canapé qui évoque les violences conjugales.

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Mais elle puise aussi ses idées dans l’actualité comme pour Luis Mariano, titre de son premier morceau posté sur Mx3 et Facebook le 11 septembre 2016. Elle raconte : « Je regardais un énième hommage aux victimes des tours de New York et ça m’a déprimée. J’ai éteint définitivement la télévision, ai écrit ‘Luis Mariano’ à 13h50, mis en musique, enregistré et balancé le tout à 20h30. »

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C’est ce titre qui va tout déclencher. Hologramme, son premier album, sort un an plus tard, arrivant dans le Top 20 en Suisse romande. Dans la foulée, Phanee est nominée aux Swiss Music Awards 2018 où elle finit 2e dans la catégorie Meilleure artiste solo féminine. En 2018, elle devient Coup de Coeur de l’Académie Charles Cros. En juillet 2019, elle a chanté devant 5000 spectateurs au Paléo Festival de Nyon.

Ses textes sont ciselés, les mots posés avec une voix claire, à la fois solide et espiègle, à l’image de cette jeune femme désarmante de spontanéité.  »J’arrive toujours à me dire que si je n’ai pas d’inspiration maintenant, ce sera plus tard. Et puis si j’en n’ai plus, et bien je postulerai à la police ! ».

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On attend son deuxième album. Pour patienter, il faut aller la voir en Suisse où elle est une star. Si vous êtes prêts à faire le voyage chez les Helvètes, les dates sont là.

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