• Pianiste virtuose, Sofiane Pamart séduit tout autant le monde de la musique classique que du hip-hop.
  • Après deux concerts complets à la salle Pleyel à Paris les 10 et 18 février, l’artiste se produira à l’Accor Arena le 17 novembre 2022. Une première pour un pianiste.
  • Il a également sorti son nouvel album Letter vendredi dernier, sous forme de déclaration d’amour à son public.

La salle est comble ce jeudi soir de février à Pleyel. Après plusieurs minutes d’attente, surgit l’obscurité. Elle inonde la salle et fait taire subitement les pépiements du public qui s’élevaient jusqu’alors du parterre aux balcons. Un immense visage apparaît en surplomb au fond de la scène, dont les yeux cerclés de lunettes sont transpercés par des éclats de lumière. Une voix robotique survient de nulle part : « Bienvenue au concert de Sofiane Pamart ». La scène s’illumine. Vêtu d’un kimono multicolore et flamboyant, l’artiste fait son entrée et s’installe en silence. S’envolent alors les premiers accords cosmiques du pianiste, et nous voilà partis pour un voyage dans les contrées de son âme.

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Durant une heure et demie, le public semble comme en apnée, hypnotisé par les jeux de lumières psychédéliques de la scénographie et suspendu aux mélodies de l’artiste. « La musique est un art où l’on peut contrôler le temps pendant un moment et quand je ressens 2.000 personnes en train de retenir leur souffle pour attendre la note suivante, ce sentiment-là est incroyable », confie-t-il à 20 Minutes quelques jours plus tard sur une terrasse ensoleillée. Sur scène, le musicien de 31 ans ne prononce pas un mot, ou presque. En dehors, il est avenant, passionné et modeste.

A ses côtés, on en oublierait presque que ce virtuose du piano dont l’univers emprunte autant au classique qu’au hip-hop, compte parmi le top des 10 artistes musique classique les plus streamés au monde. Et qu’à l’automne prochain, il sera le premier pianiste de l’histoire à remplir l’Accor Arena à Paris.

Une histoire de talent et de famille

A Pleyel, le musicien a montré les différentes facettes de son talent : des compositions émouvantes et une maîtrise magistrale de son instrument. Il y a eu aussi ce morceau partagé avec sa petite sœur Lina, violoniste. « C’est mon moment préféré, je la trouve tellement belle, tellement parfaite au moment où elle arrive sur scène. Je suis tellement fier d’elle et honoré de l’avoir à côté de moi. En plus ma famille était dans le public ce soir-là donc ça m’a encore plus touché. C’est beaucoup d’émotions et ça raconte toute notre histoire », dit-il.

Sofiane Pamart grandit en périphérie de Lille, et c’est sa mère qui incite la fratrie (il a un petit frère et une petite sœur) à apprendre la musique. Pour lui, ce sera le piano. « J’ai toujours eu l’impression que c’était comme une extension de mon corps. J’avais le sentiment d’avoir une belle allure et d’avoir trouvé un instrument qui pouvait raconter les émotions que je n’arrivais pas forcément à formuler avec des mots ». Il entre à sept ans au conservatoire et reçoit une médaille d’or à 23 ans. Un parcours brillant qui fait la fierté de ses proches. « J’ai réussi à faire de belles choses très tôt mais c’est aussi parce que j’ai été valorisé dès mon plus jeune âge. Mes parents étaient trop fiers, à chaque fois qu’on se retrouvait je jouais un morceau de piano, j’étais la star de ma famille. J’ai aimé ce sentiment-là et j’ai voulu le développer à une plus grande échelle », analyse-t-il.

En parallèle d’une éducation musicale très classique, se mêle aussi très tôt son amour pour le rap, qu’il tient notamment d’un oncle féru de hip-hop. « Petit, je fantasmais sur ces grands qui écoutaient du rap et étaient un peu marginaux et rebelles. Cette liberté je ne la retrouvais pas dans le classique au conservatoire. Moi j’avais plus envie de ressembler au rappeur, mais avec mon truc à moi qui est le piano ». Son rêve ? « Devenir le pianiste du rap français ».

Une place dans le rap français

Sofiane Pamart travaille alors avec plusieurs artistes, dont Scylla, avec qui il enregistre deux albums, mais aussi Vald, Dinos (sur le très beau morceau 93 mesures) ou encore Médine. Le pianiste se souvient tout particulièrement d’un concert partagé avec le rappeur du Havre. « Il m’a invité lors de son premier Olympia, je n’étais pas du tout connu, il m’a offert un écrin et une confiance en moi. Devant tout son public il a dit : « Un maximum de bruit pour celui qui deviendra le pianiste du rap français : Sofiane Pamaaaart ! » Personne ne me connaissait et tout le monde m’a acclamé. Je me suis toujours dit que c’était possible mais là encore plus », se souvient-il.

Le pianiste finit par se lancer en solo en 2019 avec un premier album intitulé Planet, tout en continuant en parallèle de composer pour d’autres. Deux exercices différents où il trouve son « équilibre ». « Ce que j’adore avec les artistes, c’est que je mets tout ce que je sais faire au service de leurs univers. C’est une rencontre mais j’essaye vraiment de me fondre dans leurs approches. Cela m’apporte une respiration par rapport à quand je suis face à moi-même et mes vertiges intérieurs ». Cela lui permet aussi de fédérer un public varié, issu du classique, du hip-hop, et même du jeu vidéo (il a notamment signé la musique de la pub officielle d’Assassin’s Creed Valhalla).

« Mon public ne rentre dans aucune case. Je trouve ça génial car moi non plus, et c’est exactement ce que je voulais ! », affirme le musicien. Pour lui, c’est aussi « une volonté de n’avoir de préjugés sur personne. Tout le monde est le bienvenu. C’est pour cela également que je tiens à être apolitique car je veux parler des émotions humaines, de ce qui nous rassemble et non de sujets qui peuvent diviser les gens ».

« Dear public »

Ce public, de plus en plus nombreux, qui remplit ses salles et lui réserve des standing ovations, Sofiane Pamart lui a dédié son dernier album, Letter, sorti le 11 février. Mis bout à bout, tous les titres forment une déclaration d’amour : Dear public, your love saved me from solitude forever. Sincerely, Sofiane. PS : I wrote this album in Asia. L’album a été composé et enregistré dans différents pays, au Vietnam, Japon ou encore en Corée du Sud. Il a aussi voyagé en Egypte, à Cuba et même en Laponie où il a joué en dessous d’aurores boréales. Des périples qui nourrissent sa musique et ses spectacles. L’artiste s’aventure aussi dans le monde du luxe, où il collabore avec des maisons comme Cartier, et aussi dans le métavers, en lançant récemment des NFT. Les acquéreurs ont ainsi pu écouter son album en avance, et assisteront à une répétition du fameux Bercy dans quelques mois.

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Mais quand on a reçu des récompenses prestigieuses dans la musique, fédéré le rap et le classique, parcouru le monde et rempli de grandes salles de concert, que reste-t-il à faire ? « C’est infini ! Peu importe le niveau qu’on atteint, on peut toujours se fixer de nouveaux rêves et de nouveaux objectifs, répond-il avec enthousiasme. Je commence à avoir en tête de jouer près d’un volcan, et pourquoi pas dans l’espace un jour ? Je me vois jouer du piano jusqu’à vraiment très tard, à l’image de mes maîtres, comme Henri Barda, qui joue encore trop bien à 80 ans. J’aurai des milliers de défis à relever jusque-là. »

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